§ I - Le parti communiste britannique, des origines à la grève générale de 1926.

A) Le rôle du parti révolutionnaire léniniste.

Devant la faillite de la deuxième Internationale, LÉNINE ressent la nécessité de créer une Internationale communiste. Née en mars 1919, elle est largement conforme aux idées du dirigeant bolchevique³⁴⁹. Seule une organisation disciplinée peut jouer un rôle moteur dans la lutte des classes. Les principes énoncés dans Que faire ? (1902)³⁵⁰ sont repris pour une large part au deuxième Congrès de l'Internationale ouvert en juillet 1920³⁵¹. Les vingt et une conditions d'admission traduisent la volonté de lutte contre l'opportunisme. Les plus importantes sont l'éviction des postes de responsabilité des réformistes, l'épuration des groupes parlementaires, la nécessité de la propagande communiste, en particulier dans les syndicats et l'armée, et l'adoption du centralisme démocratique. En outre, les partis affiliés doivent combiner l'action légale et illégale, et respecter les décisions des Congrès et du Comité Exécutif de l'Internationale³⁵².

L'opposition aux pratiques réformistes, par delà une critique justifiée conduit à une déviation de gauche du marxisme, le gauchisme. Liée à l'immaturité du mouvement communiste en formation, elle risque de le couper des masses. Conscient de la situation, LÉNINE rédige en 1920 La maladie infantile du communisme³⁵³, dont le texte est distribué aux délégués au deuxième Congrès de l'Internationale³⁵⁴.

Il insiste sur la nécessité de militer dans les syndicats et au Parlement. Ses développement importants sur l'Angleterre, de même que ses nombreuses interventions quant à la stratégie à adopter dans ce pays³⁵⁵, surtout à l'égard du Labour Party, expliquent l'orientation résolue du P.C.G.B. Mais ce dernier reste pourtant longtemps dogmatique, c'est à dire attaché à la lettre du marxisme et non à son esprit. L'incapacité à analyser les situations concrètes, et à apprécier les rapports de force, est source de sectarisme. Il se caractérise par trois traits. La réalité est dépouillée de sa richesse et réduite à un dilemme rigide entre deux extrêmes qui s'excluent. Les médiations disparaissent, les principes ultimes du mouvement sont toujours liés aux actions particulières³⁵⁶. Dans l'action il peut en résulter soit un défaitisme, soit un volontarisme exacerbé.

La situation paradoxale du mouvement ouvrier anglais au début du XXe siècle, explique l'attitude du P.C. Les organisations de masse sont dominées par des idées réformistes, alors que les groupes véritablement socialistes très minoritaires, restent divisés et souvent pleins de sectarisme³⁵⁷. On peut donc dire que les partis qui représentent véritablement les intérêts de la classe ouvrière unifiée par le progrès économique, et devenue plus militante, en sont relativement coupés. C'est le véritable problème du parti communiste anglais, issu d'un processus unitaire, mais qui est loin d'être le rassemblement du mouvement ouvrier organisé comme en France³⁵⁸.