Première partie – Économie, pouvoir et société

Chapitre 2. Dépopulation et accès au sol

Il faut tout d’abord définir un cadre élémentaire : un territoire, les hommes qui le peuplent et leur relation à la terre. Or, la situation du Cambodge au milieu du XIXe siècle ne peut être correctement décrite par un bilan : elle est un moment d’une dynamique historique qui a imprimé sa marque, généré des blocages, dont certains sont durables. Le passé récent du début du XIXe siècle est particulièrement tourmenté et le royaume, ballotté entre ses voisins/ennemis, n’a plus rien à voir avec l’ancien empire khmer qui dominait l’Asie du Sud-Est continentale. Les guerres incessantes, les empiètements territoriaux, ont dépeuplé un pays dont la densité était déjà faible ; ce manque d’hommes n’est que lentement comblé par le croit naturel et l’immigration (S. 1). Le roi du Cambodge aurait repris à son compte cette réponse, faite à J. Bowring, par le premier Ministre du Siam :

‘Yes, a soil, but no people. A soil without people is but a wilderness[…]  35

Ce contexte est évidemment décisif pour comprendre le libéralisme du régime d’accès au sol (S. 2).

Notes
35.

Propos tenus en 1855, cités par Akin Rabibhdana (1969, 18) : « Oui, un sol, mais pas d’hommes. Un sol sans hommes n’est qu’une jungle […] ».