1. Les religieux et le roi

Le titre du roi, voire sa vie, dépendent d’interprétations sur sa responsabilité dans des malheurs qui touchent la paysannerie. Faute de pouvoir résoudre des problèmes qui, pour l’essentiel, ne dépendent pas de lui, le roi n’a d’autre ressource que de manipuler l’information lorsqu’elle lui est défavorable. Il peut avouer ses « fautes » et les expier en même temps par une cérémonie appropriée (saut pithi) ; mais il cherche aussi à les nier.

Dans ce cas, sa marge de manoeuvre est restreinte : la religion bouddhique s’impose à lui comme un corps de doctrines et de pratiques, qu’il ne peut modifier sans provoquer une rupture de consensus. En revanche, il peut utiliser le porte-à-faux d’une religion dont l’indépendance est nécessairement fictive : le bouddhisme détient les normes qui définissent la vertu qu’elle prétend imposer au souverain. De ce fait, les religieux sont, nolens volens, des juges du pouvoir. La manière dont ils exercent leur « contrôle » dépend évidemment de l’organisation du corps social qu’ils constituent (1.1), qui déterminera largement les possibilités d’action directe ou indirecte du roi (1.2 et 1.3).