1. Paix du village, forêt sauvage

Le village est le point nodal pour comprendre le fonctionnement de la société cambodgienne, et pourtant on ne peut partir de lui pour la comprendre. C’est qu’il n’est pas un « module » de base à partir duquel on fabriquerait l’édifice social par addition, mais un condensé de phénomènes situés à de multiples niveaux analytiques. Ainsi, la prééminence de l’image communautaire est fondamentale pour saisir le déploiement de l’espace du pouvoir, mais elle prend au Cambodge des formes particulières qui entraînent une profonde atomisation sociale. La communauté réelle se conforme à un idéal implicite qui va conduire à minimiser les clivages internes, qu’ils proviennent de l’existence de la famille (1.1) ou de hiérarchies (1.2). Ces pratiques, d’où surgit l’harmonie de la vie villageoise, sont efficaces, trop peut-être : à force d’expulser ses contradictions, le village devient une entité morte, ne trouvant plus de recours que dans la royauté (1.3).