L'évolution des structures agraires du vignoble savoyard de 1970 à 1979

II est possible d'étudier l'évolution contemporaine des structures foncières, agraires et ampélographiques du vignoble savoyard, à partir de différentes sources. Les déclarations individuelles de récoltes en sont les principales. Elles se font selon un rythme annuel et permettent la connaissance exacte du nombre d'exploitations viticoles et de la superficie du vignoble, ainsi q'une définition qualitative des exploitations. En effet, la répartition de la superficie selon qu'il s'agit de vignes destinées ou non à la commercialisation ou à la consommation familiale et de vignes classées en Appellation d'Origine Contrôlée permet d'avoir une idée précise de l'évolution quantitative et qualitative du vignoble  24 .

Ces données peuvent être corroborées par les fiches d'encépagement de l'I.N.A.O. et par les demandes de labellisation déposées au Syndicat des Vins de Savoie. Il est ainsi possible de traiter l'information recueillie et qui porte sur une dizaine d'années, sous la forme de collections de courbes semi-logarithmiques qui permettent une étude de l'évolution générale et communale du vignoble savoyard. On aboutit ainsi à une classification, selon le rythme d'évolution des courbes de chaque commune.

Le vignoble savoyard : évolution 1967 – 1979. Exploitations – superficie – productions
Le vignoble savoyard : évolution 1967 – 1979. Exploitations – superficie – productions

Sources : D.G.I. – S.D.V.

Nous étudierons successivement :

Nous obtiendrons ainsi une représentation dynamique des communes viticoles savoyardes au cours de la dernière décennie.

Puis, nous compléterons cette étude quantitative et qualitative de l'évolution par trois séries d'enquêtes qui nous permettront une analyse ponctuelle, statique plus détaillée. Il s'agit de l'étude en 1977

Ces deux enquêtes nous permettront de mettre en évidence, la structure du vignoble dans chaque commune, et la spécialisation viticole de chacune d'entre elles. Nous pourrons alors, à l'aide de ces facteurs, déterminer quelle est la caractéristique dominante de chaque commune par rapport à l'ensemble : chute des exploitations mais maintien de la superficie, importance plus ou moins marquée de la petite et de la grande exploitation, spécialisation viticole marquée par la prépondérance d'un cépage, etc... On verra ainsi se dessiner un nouveau visage du vignoble savoyard façonné par une évolution différente selon les terrains, les communes... et les individus.

Afin de montrer l'importance du facteur humain, individuel, avant l'étude de l'environnement démographique du vignoble, nous terminerons cette étude des structures de vignoble par la présentation d'une donnée originale. Elle apporte un éclairage supplémentaire à notre analyse, et nous pensons qu'il s'agit d'un critère révélateur du plus ou moins grand dynamisme viticole de nos communes. Il s'agit des droits de replantation gratuits.

Rappelons tout d'abord que chaque vigneron qui arrache une parcelle plantée en vigne, est tenu d'en faire la déclaration à l'administration des Impôts. La superficie ainsi libérée est alors inscrite à son actif au Casier Viticole  25 . Il pourra la réutiliser lorsqu'il voudra replanter de nouveaux ceps, pendant un délai de douze ans. Cette procédure mise en place après guerre, permettait théoriquement de freiner l'extension des vignobles, face à une surproduction, et on espérait arriver à une réduction sensible en limitant la durée pendant laquelle il était possible de replanter. Mais de plus en plus, dans les régions où il existe des vignobles de qualité, afin de permettre aux exploitants désireux d'agrandir leur superficie en vigne et qui ne possèdent pas de droits découlant d'arrachages antérieurs, le Ministère de l'Agriculture délivre chaque année un contingent d'hectares correspondant aux demandes déposées par les vignerons et qui ont reçu un avis favorable de l'Ingénieur Régional de l'Institut National des Appellations d'Origine. Le viticulteur doit s'engager, pour bénéficier de cette possibilité, à respecter les règles en vigueur concernant le choix des cépages, la localisation des terrains qui doivent être situés dans l'aire d'appellation et les méthodes de plantation. Si aucune contre-indication réglementaire n'intervient, le vigneron recevra une autorisation de plantations valable pour trois années consécutives, et qui lui sera notifiée par l'I.N.A.O.

Il n'existe pas à notre avis de possibilité plus avantageuse pour les vignerons qui voudraient agrandir leur exploitation. Pratiquement, il leur suffit de remplir une demande d'autorisation de replantation. Cette procédure destinée à encourager une certaine catégorie de vignerons et à renforcer le caractère qualitatif du vignoble est un excellent baromètre de l'esprit d'initiative des individus et partant du dynamisme de l'exploitation et de la commune. Nous avons pu dépouiller les statistiques concernant les droits de replantations gratuits par commune et par individu en 1970 et de 1975 à 1978. L'absence de renseignements entre 1971 et 1975 n'est pas révélatrice d'un état de fait, mais la conséquence d'une situation administrative imprévue. La concordance des résultats de ce dépouillement et de nos enquêtes sur le terrain nous a renforcé dans l'idée qu'il y avait là un critère permettant de dégager les individus les plus actifs d'une commune et les communes les plus "actives" du vignoble.

Evolution de la superficie totale de 1967 à 1979
Evolution de la superficie totale de 1967 à 1979

Sources : Déclarations individuelles de récoltes

Evolution de la superficie totale plantée en vigne (1971 – 1979)
Evolution de la superficie totale plantée en vigne (1971 – 1979)
Evolution des superficies plantées en vigne de 1970 à 1979
Evolution des superficies plantées en vigne de 1970 à 1979
Superficie totale plantée par commune en 1979
Superficie totale plantée par commune en 1979

On aboutit ainsi à l'apparition d'un nouvel espace viticole, à travers l'étude de certains critères. Si cet espace viticole est perceptible dans le paysage, inversement le paysage est lui-même révélateur de modifications profondes voulues par les individus. La transition avec l'étude des structures démographiques : les hommes se fait d'elle-même.

Nous reprendrons les grandes divisions que nous avions adoptées dans la première partie : population agricole, population active agricole, chefs d'exploitation. Nous y avons ajouté l'étude de l'âge et du statut d'activité des vignerons à partir d'enquêtes qui utilisent conjointement les fichiers de la Direction Générale des Impôts et de la Mutualité Sociale Agricole, afin de cerner de façon plus précise l'importance de la double activité.

Notes
24.

Voir l'exemplaire des déclarations de récoltes en annexe.

25.

Voir en annexe