Jusqu'au décret du 24 mars 1852, Vaise était une commune de plein droit. A cette date, elle fut rattachée à Lyon en même temps que la Croix-Rousse et la Guillotière. Avant le défilé de Pierre-Scize où elle s'encaisse entre la colline de la Croix-Rousse et celle de Fourvière, la Saône coule dans une petite plaine semi-circulaire, sans doute reste d'un ancien méandre, qui constitue le site de Vaise. Sur l'ancienneté du peuplement, les interprétations sont diverses. A l'époque romaine il ne semble pas que Vaise ait été peuplé mais les récents travaux du métro ont permis de découvrir des tessons de céramique grecque datant du Ve siècle avant J.C., ce qui a fait dire au directeur régional des antiquités nationales : "Lyon a vieilli de 500 ans en quelques jours" 231 .
Au début de la Révolution, Vaise n'est qu'un tout petit bourg de 129 maisons et 1350 habitants 232 . Dès le début du XIXe siècle, la bourgade qui n'a que peu souffert du siège pendant l'insurrection de Lyon, tire profit de sa situation. Avec ses quatre ports sur la Saône et sa position en dehors de l'enceinte de l'octroi de Lyon, Vaise devient un entrepôt très actif aux portes de Lyon. Sous la monarchie de Juillet, la construction de la gare d'eau, celle d'un marché aux bestiaux, l'installation de la compagnie du gaz viennent conforter une position que même les inondations catastrophiques de 1840 ne remettent pas en cause. Lorsqu'elles prirent fin, en novembre 1840, "239 maisons s'étaient écroulées et les dégâts étaient particulièrement graves dans les quartiers neufs, où les maisons construites en pisé et détrempées par l'eau ne formaient plus que des tas de boue". Ces inondations vont avoir des conséquences durables sur l'urbanisme. Un règlement de 1844 édicte que "dans les quartiers sujets à l'inondation, tous les bâtiments, même dans les intérieurs des clos et cours, seraient construits en pierre jusqu'à la hauteur d'un mètre au dessus du débordement de la Saône" et que dans les autres quartiers, "tous les murs sans exception seraient construits en pierre depuis le sol jusqu'à la hauteur du plancher du premier étage" 233 . Des décisions comparables seront prises à la Guillotière après les inondations de 1856.
Le rattachement à Lyon en 1852 permet de réaliser des grands travaux qui avaient été différés faute de moyens financiers par la municipalité. Dès le début du Second Empire, la gare de Vaise est achevée, confortant encore le rôle de carrefour du nouveau quartier de Lyon, puis des abattoirs sont construits à proximité d'un nouveau marché aux bestiaux. Enfin, l'année même des inondations de 1856, l'endiguement complet de la Saône est commencé et des quais plantés d'arbres sont construits.
Sous la Troisième République, le développement industriel entraîne la création, au nord de Vaise, du "quartier de l'Industrie", en direction de la petite commune rurale de Saint Rambert qui sera annexée par Lyon après la seconde guerre mondiale. En dépit de ces transformations importantes qui en ont fait un vaste quartier industriel 234 , Vaise conserve toujours "l'aspect et les habitudes d'un village de banlieue" 235
L'immeuble retenu se trouve 34 rue des Docks, au cœur du quartier de l'industrie. La rue est sillonnée par des rails qui relient les ateliers à la voie ferrée et le paysage urbain est incontestablement celui d'un quartier-usine. Comme le montrent les photos, la recherche architecturale n'est pas le propre de ce type de constructions dont la façade est, à l'exception des légères saillies sous fenêtres, d'une platitude totale. Même l'immeuble, situé 24 rue Saint-Jérôme, à la Guillotière, lui aussi d'une grande simplicité, possède une façade légèrement plus complexe 236 .
Bertin Dominique et Clémençon Anne-Sophie, Lyon Guide, p. 74
Kleinclausz A., Lyon des origines à nos jours, p.367
Kleinclausz A, Lyon des origines à nos jours, p. 373
Voir Yves Lequin, Les ouvriers de la région lyonnaise,tome 1, p. 196. Citons les entreprises Piguet, Teste, Bussy, Bonnet‑Spazin, Rivoire et Carret…
Kleinclausz A, Lyon des origines à nos jours., p. 383 .
C'est à Vaise que Jacques Valdour travaille dans une teinturerie lors de sa visite lyonnaise des années 1930. Il avait déjà visité Vaise trente ans plus tôt. Voir Jacques Valdour, La vie ouvrière, Le flot montant du socialisme, les ouvriers de Lyon et Troyes, observations vécues, Paris, Nouvelles Editions Latines, 1934, p. 40-42
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