10. Les autres groupes professionnels

Les quatre derniers groupes, "services publics", retirés des affaires, personnel de service et divers ne rassemblent que des effectifs relativement faibles et leur homogénéité est moins forte que celle des groupes précédemment présentés.

Le groupe "services publics" rassemble quatre catégories, les employés des postes, les employés de chemin de fer, les employés des transports lyonnais et les gardiens de la paix, policiers et assimilés. Si ces catégories ne sont pas toutes, au sens strict, des services publics, elles ont en commun une certaine sécurité de l'emploi, des revenus qui, s'il ne sont pas très élevés, sont réguliers et payés mensuellement, et pour trois d'entre elles, un avancement et une carrière scandée par des examens et des mutations assez fréquentes. Le cas des postiers est l'un des plus typique "Cette administration forme une véritable armée qui a ses soldats, ses sous-officiers, ses lieutenants, ses capitaines et son état-major. Mais il faut bien le dire, là comme ailleurs, l'état-major est relativement peu nombreux : le gros de l'armée des employés ne dépasse pas les situations modestes... Avec des aptitudes moyennes, de l'exactitude, de l'assiduité, l'employé des postes et télégraphes obtient lentement, mais régulièrement les avancements que lui confèrent les règlements. Il ne peut compter, ni sur le hasard, ni sur les efforts tardifs pour voir sa situation augmenter au delà d'une certaine mesure. Lorsqu'il a atteint un maximum, il se heurte à une barrière infranchissable, à moins qu'il n'ait subi l'examen supérieur." 587

L'agrégation des diverses appellations qui constituent ces catégories n'a pas posé de difficultés particulières. Trois éléments peuvent être remarqués. D'une part, dans ce groupe en expansion constante, plus de 60% des électeurs utilisent comme appellations des composés d'employés mais en 1911, on constate une chute très nette de ces appellations due à l'apparition de sigles à la place des appellations traditionnelles. Si l'on ne compte qu'un seul PTT, on dénombre 5 OTL (Office des Transports Lyonnais) 588 et surtout 14 PLM. Cette utilisation des sigles dépend sans doute, mais rien ne permet de le prouver, de la manière dont les employés municipaux enregistrent ces électeurs par ailleurs très mobiles. Cette mobilité explique sans doute la fréquence des changements formels sinon sémantiques des appellations qui les désignent.

Une nette évolution dans la manière de se dire caractérise les cheminots. En 1896, 13 d'entre eux se disent employés de chemin de fer et 4 employés PLM, mais dès 1911, la situation est inversée en 1936 on compte 39 employés PLM pour un seul employé de chemin de fer. Le PLM est hégémonique à Lyon même si certains cheminots sont employés par les lignes d'intérêt local mais cela ne peut expliquer le renversement qui s'opère entre 1896 et 1911. D'une appellation générale, se référant à une technique, symbole de l'expansion du XIXe siècle, on passe à une appellation faisant directement référence à un réseau. Est-ce la manifestation, dans la façon de se dire, de "l'esprit de famille" et du paternalisme de réseau, est-ce le sentiment d'appartenir au réseau avant d'être membre d'une profession ? La grève de 1910 peut-elle être invoquée ? Ou n'est ce, encore, que le reflet des pratiques des employés municipaux, employé (et plus souvent "emp") PLM s'écrivant plus vite que employé de chemin de fer ?

Le groupe des retirés des affaires rassemble diverses catégories : les retraités du public et du privé, divers inactifs. J'ai déjà signalé l'évolution significative des rentiers et des propriétaires. Ils sont avec la catégorie des sans professions (notés SP par les agents municipaux) la catégorie la plus nombreuse. Ce groupe est assez hétérogène socialement puisqu'il rassemble des électeurs de situations très différentes, du retraité PLM au rentier, mais il n'était pas possible pour les traitements ultérieurs de ne pas réunir tous les inactifs en un seul groupe.

Le personnel de service réunit des appellations très disparates où l'on repère des évolutions attendues, la diminution du nombre des cochers, et d'autres qui semblent plus aléatoires comme celles des valets de chambre ou des concierges. Quoi qu'il en soit ces diverses appellations ne rassemblent que des effectifs restreints et leur influence statistique est faible.

Le groupe divers réunit aussi bien les quelques professions qui témoignent du rôle portuaire de Lyon, les artistes, le clergé dont les appellations sont relativement nombreuses (prêtre, mais aussi missionnaire, frère hospitalier et ecclésiastique) et les électeurs sous les drapeaux qui sont inscrits sous l'appellation militaire, c'est à dire en fait sans profession déclarée. Cette dernière appellation est liée à la pratique des employés municipaux. Dans certains arrondissements, les jeunes effectuant leur service national sont tous inscrits comme militaires, c'est le cas du 3e et du 4e arrondissements alors qu'ailleurs cette appellation est exceptionnelle.

Après cette longue mais indispensable présentation de la nomenclature professionnelle, il convient d'aborder les variations d'appellations qui peuvent concerner le même individu en fonction de la source utilisée.

Notes
587.

Edouard Charton, Dictionnaire des professions.p.432

588.

L'office des transports lyonnais a été constitué en 1879.