IX. QUITTER LA VILLE

A. La première cohorte

La première cohorte est constituée par 1/10 des générations 1872, 1873.1874 et 1875 inscrites sur les listes électorales de 1896. Elle compte, à cette date, 761 individus. Cinq ans plus tard, en 1901, seuls 447 individus ont été retrouvé dans les listes électorales. Dans 314 cas, les recherches se sont révélées vaines. Afin de mesurer le flux migratoire dans cette première cohorte, il fallait pouvoir apprécier les absences dues au décès des individus. On aurait pu envisager de dépouiller les actes de décès de la période mais ce n'est pas la solution que j'ai retenue, pour de simples raisons pratiques. J'ai choisi d'estimer, à l'aide de tables de mortalité 751 , les décès survenus entre 1896 et 1901. Ils sont au nombre de 29. Le flux d'émigration est donc de 314 - 29 =285. Rapportée à l'effectif initial, le flux migratoire provoque, en cinq ans, une diminution de -37,4% du stock initial. Cela équivaut à un taux de croissance moyen annuel de -8,9% ou de -89 pour mille. Pour la période suivante, l'estimation des décès a, bien entendu, été calculée en fonction de l'effectif initial de la nouvelle période considérée, soit 447. Les décès entre 1906 et 1911 se sont élevés à 17. Puis le même processus a été reconduit.

Telle est la méthode appliquée aux effectifs de la première cohorte de 1896 à 1936 afin d'estimer l'émigration qui affecte les électeurs nés entre 1872 et 1875. Elle repose sur un postulat : une fois défalquée la mortalité moyenne des générations concernées aux âges considérés, les individus non-retrouvés dans les listes électorales correspondent aux émigrants. Le tableau suivant en présente les résultats bruts.

Tableau n° 55 : Emigration et décès dans la première cohorte, 1896-1936
Tableau n° 55 : Emigration et décès dans la première cohorte, 1896-1936

Ce tableau souligne l'impact de la première guerre mondiale qui, bien que la cohorte soit composée d'hommes ayant tous dépassé 35 ans en 1914 et donc souvent à l'écart des combats de première ligne 752 , a provoqué une très nette augmentation des décès.

Notes
751.

Vallin Jacques, La mortalité par génération en France, depuis 1899, cahier de l'I.N.E.D. n° 63, P.U.F.. 1973, 483 p.. Les tables de mortalité des générations 1872. 1873, 1874 et 1875 se trouvent p. 397-400. Les taux de mortalité antérieurs à 24-27 ans ne sont pas fournis. J'ai considéré qu'ils étaient équivalents à ceux de la première année connue. Pour la génération 1872, les décès, entre 27 et 28 ans, se sont élevés à 746 pour 100000. Le même chiffre a été retenu pour 22-23 ans, 23-24 ans...

752.

Voir François Bédarida , "Des réalités de la guerre aux mirages de la prospérité", L.H. Parias, Histoire du Peuple Français, tome 5, 1967. p.256-257 : "De 20 à 35 ans, les Français sont affectés aux unités combattantes ; de 35 à 47 ans, ils se partagent entre combattants et service de l'arrière ; au delà de 48 ans, ils sont versés dans les territoriaux."