1°) L’évaluation directe des dommages

Dans l’évaluation directe des externalités, appelée aussi évaluation des dommages dans le cas d’externalités négatives, on considère les effets des externalités (atteintes à l’environnement ou à la personne humaine) comme des pertes (ou gains) de ressources dont il s’agit de déterminer le « prix coûtant » ou la « valeur productive ».

Cette méthode d’évaluation est a priori objective, puisqu’elle se fonde directement sur les dommage (« procédure d’évaluation directe »). Une telle évaluation est cependant difficile, du fait des valeurs non comptables que sont par exemple le bruit, la pollution, l’insécurité... Des méthodes existent, comme par exemple la mesure de la dépréciation du prix des logements exposés au bruit. On peut aussi établir des enquêtes auprès des populations exposées aux nuisances sur leur consentement à payer pour réduire ces nuisances, théoriquement proche du coût des dommages dus à ces nuisances. Mais la dispersion des résultats de ces enquêtes reste importante. En tout état de cause, ces évaluations nécessitent nombre d’hypothèses, et les résultats auxquelles elles donnent lieu doivent être pris avec les plus grandes précautions. Il faut admettre qu’il est impossible d’évaluer de façon précise les coûts des dommages, et que ces méthodes ne peuvent, au mieux, que situer les enjeux. En tout état de cause, la recherche des effets sinon monétaires, du moins « physiques » des dommages est indispensable.

On constate en fait qu’une évaluation « objective » des dommages, nécessaire à la fois à la réalisation de l’optimum, mais aussi à son existence, reste inaccessible. Rothengatter constate ainsi, à propos d’un « principe pollueur payeur » (directement lié aux principes de taxation pigouvienne) 86  :

‘« On a d’une part, une communauté d’émetteurs dont la participation à l’émission globale varie selon le groupe d’appartenance et, d’autre part, un ensemble de victimes dont l’atteinte par les émissions varie selon le groupe d’appartenance. Face à cette imbrication des effets, le principe pollueur/payeur aussi juste qu’il puisse paraître doit inévitablement faillir car, dans peu de cas seulement (...), il est possible d’établir un lien causal entre l’émission et le dommage ».’

Ces limites amènent alors Rothengatter à conclure que les approches fondées sur l’évaluation des dommages reposant « sur une charpente théorique peu solide, (...) associer leur application à des notions telles que l’internalisation des effets externes ou l’allocation optimale des facteurs sur le plan de la société paraît risqué. »

Notes
86.

Op. Cit., pp.11, 28, 36.