3°) Les limites des méthodes directes ou « objectives »

Nous touchons ici les limites de l’approche néoclassique de la société, que nous avions présentées sommairement dans le cadre général, et que nous retrouvons dans les problèmes d’évaluation des coûts externes. Ces limites conduisent nécessairement à rejeter la possibilité d’existence d’états de la société correspondants aux concepts d’optimum de Pareto, et d’allocation optimale des ressources, concepts qui selon Rothengatter, ont « plus gêné que facilité » la mise en oeuvre d’une internalisation.

Cette remarque a priori paradoxale nous aide en fait à comprendre pourquoi les évaluations d’effets externes sont amenées à dissocier les notions de « coûts externes » et « d’allocation optimale des ressources ». Désormais, l’internalisation des coûts externes ne consiste alors plus à viser une idéaliste et irréaliste allocation optimale des ressources, mais à « faire ressortir des éléments qui autrement ne seraient traités qu’en marge », et à transformer des « biens, considérés comme libres, en biens rares ». Avec les approches par l’évitement ou par les risques, nous allons voir que l’on quitte effectivement toute prétention d’évaluation « objective », directement liée au concept parétien d’allocation optimale, pour des recherches plus indicatives, des tâtonnements, qui se fondent « sur la fixation de limites supportables ». Pour Rothengatter notamment, il est clair que l’abandon des évaluations directes écarte du cadre « normal » de l’économie privée : « Les coûts additionnels du transport, quantifiés en coûts d’évitement, ne correspondent pas à une consommation évaluée de ressources et ne sont de ce fait pas comparables a priori aux coûts d’économie privée. 89  »

L’impossibilité de déterminer ces prix ou valeurs d’éléments non marchands amène finalement à la construction d’un indicateur du « produit social » : on retrouve alors une fonction de bien être collectif non pas « objective », mais construite par l’économiste, au mieux par des valeurs tutélaires publiques lorsqu’elles existent, mais plus généralement par des valeurs « subjectives ».

Notes
89.

Rothengatter, Op. Cit., p. 4.