III1.2 Cas de non effectivité d’une internalisation et d’indétermination théorique du fait de coûts d’évitement à rendement croissant

Les externalités, nous l’avons vu, sont par nature indéterminées (impossibilité des évaluations directes). Cependant, cette indétermination est supposée élémentaire, c’est à dire pour chaque nuisance, et les analyses de second ou nième rang partent du principe qu’une internalisation même partielle de coûts externes peut conduire à une allocation des ressources plus satisfaisante, car s’appuyant d’avantage sur des mécanismes décentralisés de marché.

Cependant, l’existence de rendements croissants dans les coûts d’évitement peut amener des cas d’indétermination théorique globale, qui d’une part ne permettent plus à l’économiste de juger de l’optimalité d’un état de l’économie, et qui peuvent amener des phénomènes de « catastrophes », c’est-à-dire des discontinuités fortes des états de l’économie après internalisation, suivant les valeurs affectées aux coûts externes.

Nous pouvons illustrer cette possibilité en étudiant l’équilibre d’un marché de l’évitement pour lequel existe d’une part une incertitude sur les dommages, et d’autre part une fonction de coûts d’évitement à rendements croissants.

Soit les fonctions continues et dérivables :

Il est généralement admis que la fonction dommages est strictement décroissante en fonction du niveau d'évitement e, et strictement convexe, soit :

Pour l'évitement des nuisances du trafic routier, ou dans le cas de croissance de l’intérêt pour l’environnement en fonction du niveau de sa protection, nous avons vu cependant précédemment que nous étions amené à considérer comme vraisemblables les hypothèses de rendements croissants :

Suivant ces nouvelles hypothèses, il est facile de montrer l'existence d'une fonction dommages pour laquelle le signe de :

Comme illustré sur la figure suivante :

Nous voyons que l'incertitude sur les dommages, aussi petite doit-elle, peut amener théoriquement une possibilité de phénomène de discontinuité entre deux états possibles d'évitement des nuisances. Si l’on se fonde sur la borne inférieure de la fonction dommages CX(e)= f(e) - Δ(e), le niveau d’évitement économiquement justifié est nul. Par contre, si l’on se fonde sur la borne supérieure CX(e)=f(e) + Δ(e), le niveau d’évitement économiquement justifié est maximal. Il y a discontinuité entre le niveau d'évitement économiquement justifié et le niveau de la fonction dommage.

Cette démonstration nous permet de comprendre pourquoi en présence de coûts d’évitement à rendements croissants :