III3.2 Le problème de l’abandon des externalités pécuniaires ou l’insuffisante prise en compte par l’économie de la réalité des choix politiques

Martine Quinzi (1988) 154 , précise comment le problème des rendement croissants, introduit par Marshall, ont été évacués vers les théories de la concurrence monopolistique, ainsi que vers les débats sur les systèmes de tarification, entre équilibre budgétaire et coût marginal social. Les analyses en termes d’externalités pécuniaires, considérées par la suite comme superflues, on été alors abandonnées. Pourtant, le cas de concurrence entre activités à rendements croissants et décroissants, est un cas typique qui se présente dans l’analyse économique de l’environnement. Comme nous l’avons vu précédemment, certains choix de politiques d’évitement peuvent conduire à de tels cas de figure, ou l’on se trouve en situation de concurrence entre l’activité polluante à rendement décroissants, et l’activité d’évitement à rendements croissants.

En fait l’économie classe ces productions à rendements croissant non pas dans la catégorie des activités d’évitement de nuisances, mais dans la catégorie générale des productions publiques à caractère monopolistique. Ce classement peut s’expliquer par le refus d’envisager comme mesure d’évitement une activité qui évite non pas telle ou telle nuisance, mais qui globalement se pose en alternative à une production nuisante. Ce caractère global est jugé suspect par l’économiste, qui a une méfiance naturelle pour toute mesure globale, et fait plus confiance à l’action décentralisée du marché.

Face aux situations d’indétermination que rencontre la théorie économique, il faut pourtant admettre que le choix politique est inévitablement conduit à des choix d’évitement globaux, que nous appellerons par la suite choix de structure. Le décideur politique peut certes adopter des normes pour un certain nombre de nuisances, mais le coté innombrable des nuisances, leurs imbrications les unes entre les autres, leur complexité, ne permet pas d’éviter la nécessité de choix de structure. La possibilité que nous avons évoqué d’une évolution des fonctions de demande pouvant rendre inopérante une internalisation par les prix renforce cette nécessité.

L’insuffisance d’une théorie réduisant son bagage conceptuel aux seules externalités technologiques devant la réalité de tels choix de structure est manifeste : il conduit l’économie à s’enfermer dans une interprétation de la réalité certes utile, mais insuffisante. En s’écartant trop de la réalité politique et sociale, l’économie passe alors à coté d’enjeux majeurs.

Notes
154.

QUINZII, Martine (1988), Rendements croissants et efficacité économique, Monographies d’Econométrie, Editions du CNRS.