Section II3- L’internalisation des externalités pécuniaires « de structure » sous contrainte budgétaire

II3.1 Problème du déficit, contrainte budgétaire et règle de Ramsey

Mais doit-on cependant se résigner à accepter les déficits induits par le principe de tarification au coût marginal social (ou au « coût économique ») ? Comme le précise Mark Blaug 456 , « en dehors de toutes considérations, reste le vieux problème de la couverture du déficit des entreprises à coûts décroissants. Puisque le déficit doit être financé par la fiscalité et puisque tout impôt en dehors d’une capitation arbitraire provoque des distorsions de prix, la tarification au coût marginal social renvoie nécessairement au problème de la maximisation de la production en présence d’une contrainte supplémentaire : les recettes de l’Etat doivent être égales à la somme algébrique de tous les déficits (ou excédents) des entreprises individuelles dans l’économie, ce qui est précisément un problème de second rang ». Ainsi, du fait de la contrainte budgétaire, « les arguments de second rang en faveur de la tarification au coût marginal social exigent non pas des prix égaux au coût marginal, mais des prix qui s’écartent systématiquement des coûts marginaux. (...) L’écart, dans chaque cas particulier, étant d’autant plus grand que l’élasticité de la demande du produit considérée est plus faible ».

Selon Xavier Greffe (1994) 457 , cet écart « signifie deux choses :

  • on a intérêt du point de vue du bien-être à taxer plus fortement le bien dont la demande est inélastique que celui dont la demande est élastique ;
  • à la limite, le système d’imposition optimal est celui où les taux d’imposition respectifs des biens et services sont inversement proportionnels à l’élasticité de leur demande. C’est la règle dite des élasticités inverses de Ramsey ».

Cette règle consiste en fait à assurer la couverture du déficit budgétaire plutôt par les biens dont la demande est inélastique, que par les biens dont l’élasticité-prix est forte. C’est une règle dont le bon-sens est évident : taxer trop fortement les dernier conduirait à d’importantes baisses de consommation et à des pertes en surplus collectif beaucoup plus sensibles que celles dues à la taxation des biens à demande inélastique 458 . La règle de Ramsey consiste en fait à assurer l’équilibre budgétaire global de l’ensemble des biens publics sous contrainte d’une minimisation des pertes de surplus collectif dues aux nécessaires écarts aux coûts marginaux.

Revenons à notre marché de l’évitement entre une activité A nuisante (coûts à rendements décroissants) et une activité B d’évitement (coûts à rendements croissants). Nous allons montrer que l’internalisation de l’externalité pécuniaire de A sur B sous contrainte budgétaire revient en fait à appliquer la règle de Ramsey, c’est-à-dire à proposer pour A et B des écarts à leurs coûts marginaux qui permettent de couvrir l’équilibre budgétaire global du système (A+B) sous contrainte de minimisation des pertes de surplus dues à ces écarts.

Notes
456.

Op. Cit. pp. 719, 720.

457.

GREFFE Xavier (1994), Economie des politiques publiques, Dalloz, 546p, p. 230.

458.

pertes illustrées par Greffe, p. 229.