III2.1 L’externalité pécuniaire « de structure » du service public « à la française »

Nous avons vu que, dans les espaces contraints ou il s’agit d’orienter la demande vers des systèmes de transport plus écologiques, le choix politique adopte un projet qui, du moins à court terme, ne correspond pas à la logique marchande. Ainsi, il est clair qu’un minimum de liberté dans l’orientation des politiques des transports est incompatible avec un principe d’équilibre budgétaire par mode de transport. Un tel principe, qui correspond à une orientation stricte des investissements en fonction de la demande privée n’est pertinent que dans les cas ou la collectivité est neutre, c’est-à-dire n’exprime aucune préférence sociale particulière entre les différents modes de transport.

Par contre, la concordance d’une volonté politique de maîtrise de la demande et/ou de service public et d’une volonté d’équilibre budgétaire par mode conduit à une externalité pécuniaire « de structure » évidente :

On conçoit de façon triviale comment une telle externalité pécuniaire « de structure » conduit à multiplier déficits et endettements des entreprises ferroviaires. D’un coté, la volonté politique d’orientation de la demande et/ou de service public conduit à mettre en avant des choix d’infrastructures et de services publics financièrement non rentables. De l’autre, la volonté politique de couverture des coûts de chaque mode fixe aux entreprises de transport collectif des objectifs d’équilibre de leurs comptes. Cette incompatibilité d’objectifs peut conduire les entreprises de transport public à des stratégies de productivité défensives, qui conduisent finalement ni à remplir les objectifs de service public (baisse de la qualité), ni aux objectifs d’équilibre des comptes (pertes de clientèle et creusement des déficits).

On peut voir ainsi dans les contrats de Plan Etat - SNCF en France une contradiction fondamentale entre la demande des pouvoirs publics de comptes équilibrés, et la multiplication de demandes de services publics financièrement non rentables. Cette contradiction fondamentale conduit peu à peu la SNCF d’une part à des stratégies de productivité défensives et à court terme sur les créneaux non rentables (suppression de la restauration dans les trains, suppression de services et de personnels en gare, sous-investissements), et d’autre part à un système de tarification marchand pour récupérer les surplus des créneaux rentables (systèmes de réservation Socrate). Un telle évolution induit une baisse de la qualité de service globale considérable et fait fuir la clientèle vers l’automobile et le transport aérien 477 .

Le mécontentement croissant de la clientèle ferroviaire française, dont la mise en place du système de tarification Socrate n’a été qu’un révélateur, illustre l’incapacité croissante de la SNCF à répondre aux demandes contradictoires des pouvoirs publics. La SNCF peut être soit une entreprise de service public, soit une entreprise purement commerciale. La confusion de deux missions incompatibles ne peut structurellement qu’aggraver la dégradations des services et le creusement des déficits.

Notes
477.

qui propose des prix attractifs pour la clentèle jeune et une qualité de service incomparable.