L’espace ainsi défini - et celui que les Indiens considèrent comme le théâtre d’une marche himalayenne - couvre une superficie de près de 640 000 km2 au sud des lignes de plus haute altitude. Il est politiquement divisé entre quatre Etats : Pakistan, Inde, Népal, Bhoutan, ayant comme voisin la Chine au nord163.
| Etat | région | superficie (km2) |
| Pakistan | Cachemire/Baltistan | 27 219 |
| Inde | Cachemire | 222 236 |
| Pendjab | 55 500 | |
| Kumaon | 51 100 | |
| Népal | Népal | 142 124 |
| Inde | Sikkim | 10 300 |
| Bhoutan | Bhoutan | 46 500 |
| Inde | Arunachal | 83 700 |
| total | 639240 |
On ne trouve pas dans le discours du gouvernement chinois un concept de “ frontière himalayenne ” tel qu’il est compris en Inde : la chaîne demeura longtemps inconnue du monde chinois : le Hua I Thu (carte de la Chine et des Pays Barbares, datée sans doute de 1040) l’ignora164 et les dirigeants chinois montrèrent une connaissance assez imparfaite du terrain lors des discussions de frontières avec les Britanniques à la fin du siècle dernier, confondant un temps la chaîne du Karakoram et celle des Kuen Lun, ignorant l’existence de celle de l’Aghil165. L’inscription de la Chine sur le massif est surtout celle de sa limite politique face à l’Inde, telle qu’elle fut formellement définie lors des entretiens frontaliers entre Inde et Chine tenus à Beijing entre juin et septembre 1960, consignés dans le Report of the Officials of the Governments of India and the People's Republic of China on the Boundary Question 166 et qui officialisa en outre le partage de la dyade entre secteur occidental, secteur central et secteur oriental. La limite occidentale d’une frontière “ himalayenne ” de la Chine peut être fixée à la trijonction Chine / Inde / Pakistan au Karakoram-la ; sa limite orientale à la trijonction Inde / Birmanie / Chine167 même si la section nord de la dyade Chine-Birmanie est “ himalayenne ” dans son horogenèse, puisque délimitée une première fois en 1914 à l’occasion du traité de Simla.
Bien qu’elle ait accepté le principe de définition des différents segments lors des discussions frontalières sino-indiennes précédant le conflit de 1962, l’Inde maintient une revendication sur un segment de frontière qui va plus à l’ouest que le Karakoram-la qui avait été retenu comme borne occidentale. Les revendications indiennes portent sur des tracés et des territoires qui s’étendent jusqu’à proximité du col de Kunjerab Dawan, et même jusqu’à la trijonction Pakistan - Afghanistan - Chine, si on prend en compte le refus du gouvernement indien de reconnaître l’actuelle souveraineté qu’exerce le Pakistan sur les territoires du Baltistan, même si ce n’est plus une interaction himalayenne d’un point de vue orographique. Par contre, ce dernier segment est certainement “ himalayen ” dans son horogenèse, puisqu’issu de la même dynamique historique que les autres frontières en question.
Superficies des entités administratives des Etats concernés. Pour la Chine, le chiffre est approximatif, en raison de la configuration particulière des districts au nord de l’Indus et du Tsangpo.
Dorothy Woodman, op. cit., p. 4.
Se reporter au chapitre 7 pour une ébauche de la partition de l’enveloppe frontalière chinoise, en fonction de critères plus ethniques que physiques.
Report of the Officials of the Governments of India and the People's Republic of China on the Boundary Question, Ministère des Affaires Etrangères, New Delhi, 1962.
Birmanie ou Myanmar? Le changement imposé en 1989 par le gouvernement militaire au pouvoir pour intégrer symboliquement les peuples non birmans, n'est pas internationalement reconnu, notamment par le Département d’Etat des USA.