b) Enjeux Territoriaux

De l’Imis la, la frontière prend une orientation sud-nord, le long de la chaîne du Zanskar, puis est-ouest pour intégrer en territoire tibétain le cours médian du Pare chu. La frontière s’appuie alors sur ses affluents rive gauche (Kyumsalung Panglung) et rive droite (Chepzilung), à la hauteur de la bourgade frontière de Chepzi. Elle suit ensuite une direction nord-ouest, sud-est sur un chaînon oriental du Grand Himalaya. A la hauteur de la confluence du Pare chu avec la Spiti, la frontière est l’objet d’un premier contesté entre Inde et Chine :

  • selon les autorités chinoises, la limite demeure sur la ligne des plus hautes altitudes, intégrant en territoire tibétain la confluence entre les deux rivières ;

  • la revendication indienne se porte sur un chaînon secondaire, qui court parallèle à la crête principale, sur son flanc oriental et qui est ligne de partage des eaux. Elle intègre en territoire indien les bassins-versants des émissaires de rive gauche et de rive droite du Pare chu, entre les hameaux de Churung et de Bumdo.

Immédiatement au sud de ce secteur d’environ 350 km2 lui succède un second, qui met en cause le contrôle d’un des principaux points de franchissement de l’Himalaya : le Shipki la (4 695 m), qui domine en rive gauche la Sutlej (Langchen Kham chu) lors de son franchissement de la chaîne du Zanskar.

Au sud du Shipki la, la frontière prend une direction nord-ouest sud-est et suit la ligne de partage des eaux, isolant les cours supérieurs des affluents de rive gauche du Kangchen Kham chu, des sources du Gange et de la Yamuna. La frontière laisse en territoire indien les massifs montagneux du Gangotri (6 614 m) et de la Nanda Devi (7 817 m), entre lesquels les Ganges prennent leur source, jusqu’aux environs du Lipu Lekh la (5 453 m), un des principaux axes transhimalayen, aujourd’hui surtout fréquenté par les pèlerins et les touristes (occidentaux) en route vers le mont Kailash.

Deux segments litigieux existent, là où la ligne de partage des eaux n’est pas portée par la chaîne du Zanskar, mais par un chaînon qui la longe, à l’est :

  • une centaine de kilomètres plus au sud, le litige porte sur l’appartenance du bassin récepteur de la Bhagirathi, une des trois sources du Gange. Le tracé chinois porte sur la ligne de crête du Zanskar, tandis que la revendication indienne englobe les sources de la rivière, plus à l’est (environ 950 km2).

  • c’est ensuite le bassin récepteur de la Dhauli Ganga, où les revendications sont similaires, portant sur 275 km2.

La même logique de situation caractérise les différents secteurs en litige : dans tous les cas, les revendications (qui sont de taille réduite, comparés aux autres secteurs de la dyade) portent sur des supports identiques : ligne de partage des eaux pour l’Inde, ligne de crête pour la Chine, parce qu’il n’y a pas coïncidence entre les deux supports. Mais les revendications ne tiennent pas tant aux supports physiques réclamés qu’aux espaces qu’ils circonscrivent : ils concernent avant tout des lieux de franchissement de la chaîne : Shipki la et Lipulekh la pour les passages majeurs, Niti la, Kungribingri la et Darma la pour les axes secondaires et, accessoirement, des zones de pâturages. Les revendications relèvent, semble-t-il, du niveau de la tactique, de l’avantage-terrain, où les troupes chinoises bénéficient de la climatologie spécifique de ces zones “ en saillant ” évoquées plus haut et dont on retrouve les effets plus à l’est.