Au nord, le dispositif frontalier britannique se composait, sauf à son extrémité orientale, d’une série de principautés vassalisées qui furent à l’indépendance intégrées à l’Inde, sauf trois : le Népal, le Sikkim et le Bhoutan. L’annexion du Tibet par la RPC entraîna la rétraction du dispositif en deçà des lignes de crêtes du grand Himalaya et ces trois Etats devinrent les nouvelles marches externes du pays, les nouveaux Etats-tampons face au même ennemi, nouveau voisin de facto, la Chine. Les approches différenciées dont firent montre les gouvernements de l’Inde vis à vis de ces Etats relèvent en premier lieu de la reconstruction d’un dispositif stratégique pour répondre à la menace chinoise.
Elles intègrent aussi deux dynamiques pas forcément liées, d’une volonté de rayonnement régional, qui ne s’est encore départie d’une certaine vision hégémonique de l’Inde en Asie du sud, et de l’obligation de tenir compte des processus sociaux et politiques à l’oeuvre dans les collines. Ces deux dynamiques se compliquent, l’une par l’émergence d’une structure de coopération inter-étatique - la SAARC - et l’autre par la libre circulation des hommes et des idées dans les régions himalayennes grâce à des frontières qui ont été voulues “ ouvertes ”. Les pratiques du gouvernement indien dans les Himalayas sont enfin indirectement influencées par l’antagonisme - encore perçu comme irréductible 1063- qui oppose le pays au Pakistan, parce qu’il constitue depuis 50 ans une donnée de base de la politique extérieure de l’Inde, de sa défense et de son économie, mais aussi parce qu’il fournit un instrument mobilisable par la Chine, au même titre que les Etats des collines, pour peser dans la dynamique de l’interaction sino-indienne.
Notamment de la part des hindouistes du BJP, pour qui l’existence même du Pakistan est une humiliation infligée à l’entité Inde, qu’ils revendiquent au travers de l’Arkhand Bharat, en fait le sous-continent.