3.1.1 - La création de l’I.S.A.R.A. par les Facultés Catholiques de Lyon en 1968

Sur le plan institutionnel, l’I.S.A.R.A. est né de la Faculté des Sciences de l’Université Catholique de Lyon. Dès 1966, le secteur sciences naturelles de cette Faculté connaît d’importantes difficultés, liées à la mise en application partielle de la réforme des études supérieures227. L’Etat ayant le monopole de la collation des grades, il se pose la question des équivalences pour les universités catholiques. Excepté la Faculté de Théologie, les Facultés de Sciences, de Lettres et Sciences Humaines et de Droit ont concentré leurs efforts sur les instituts qui existaient ou pouvaient naître à partir d’elles228.

Au sein de la Faculté des Sciences, l’I.S.A.R.A. et l’École de Biochimie ont pris à peu près toute la place. Joseph Lepercq, Président de la société civile des Facultés Catholiques et M. le recteur Hoestlandt en sont les fondateurs. Lors de la rentrée solennelle des Facultés Catholiques de 1968, la création de l’École est présentée en ces termes par le recteur Hoestlandt :

‘«  Nous venons d’ouvrir deux écoles, et ceci dans des secteurs d’enseignement, qui sont uniques pour notre région. Il s’agit d’abord d’une École Supérieure d’Agriculture, la première école de ce genre dans le sud-est de la France. En quatre années d’études, nous comptons préparer les étudiants à la carrière d’Ingénieur Agricole, en insistant notamment sur les problèmes d’Économie et de Gestion. Nous sommes reconnaissants aux organismes agricoles du sud-est pour leur compréhension et leur appui. L’I.S.A.R.A. est dirigé par Monsieur Laget assisté de Monsieur l’abbé Lamberet, directeur des études. »229

L’I.S.A.R.A. se constitue en association Loi 1901 au cours de sa première année de fonctionnement. Outre le directeur général et le directeur de études, le conseil d’administration compte dix membres. Trois sièges sont attribués aux Facultés Catholiques : M. le recteur Hoestlandt, M. Lepercq, président de la Société Civile des Facultés catholiques, M. Perrachon, trésorier. Sept personnes sont des représentants de la profession agricole : le Président Bonjean, président de la Mutualité agricole, président de la M.S.A du Rhône, président des organisations mutuelles du sud-est, André Charassin, secrétaire général des organisations du sud-est, représente l’union du sud-est, Louis Chaine, Antonin Dougerolle, Albert Genin, Joseph Grillon. Florent Nové-Josserand, agriculteur du Rhône, président de la Chambre d’agriculture du Rhône, président des Maisons familiales, vice-président de la F.N.S.E.A., accepte la présidence du conseil d’administration.

L’I.S.A.R.A. a été lancé par les Facultés Catholiques parce que celles-ci souhaitaient d’une part, ‘« rééquilibrer leur système de formation, compléter la couronne d’écoles dérivant de la Faculté des Sciences »’ 230 et, d’autre part, saisir l’opportunité du créneau agricole. Opportunité géographique puisque, entre Dijon et Montpellier, il n’existait pas d’école supérieure d’agriculture ; opportunité politique, car la profession agricole avait opté pour la modernisation et, par la loi de 1966, était partie prenante du développement agricole. Les organisations professionnelles étaient alors appelées à augmenter leurs effectifs. Pour les représentants de la profession agricole de la région Rhône-Alpes, l’ouverture d’une école régionale pour former des ingénieurs en agriculture est perçue comme une occasion à saisir.

‘« A l’époque, on a demandé à un certain nombre de responsables professionnels agricoles s’ils étaient intéressés à la création d’une école supérieure agricole, ici à Lyon, dans les Facultés Catholiques. Nous avons été sollicité par des responsables des organisations agricoles du sud-est.... Donc, cela nous intéresse tout de suite... Monsieur Charassin est venu nous solliciter et nous avons accepté. Je termine en disant : nous avons accepté avec un certain empressement, parce que nous étions des responsables agricoles. On avait beaucoup fait pour l’enseignement agricole en général, des sessions de formation, de la formation continue et nous avions conscience qu’il manquait dans notre région une école supérieure agricole.»231

Les fondateurs ont profité de la loi sur l’enseignement agricole, en particulier la loi de 1960, qui reconnaît l’existence de l’enseignement agricole privé, et ont répondu à la volonté du gouvernement de désenclaver l’agriculture, notamment en facilitant l’accès des enfants de paysans au plus haut niveau de formation. Lors d’une rencontre avec Edgar Pisani, ministre de l’Agriculture, le P. Duparc, directeur de l’École d’agriculture d’Angers, expose le projet de son établissement : former des agriculteurs, former des hommes de terrain, former des hommes d’action. Cela intéresse vivement Edgar Pisani, qui soutient le développement de l’école, ainsi que de celles de Beauvais et de Purpan. A Lille, Norbert Segard, qui souhaite faire de l’Université catholique un institut polytechnique, décide aussi la création de l’Institut supérieur d’agriculture (1965). Ces initiatives sont de nature à encourager les Facultés Catholiques de Lyon qui se disent ‘« pourquoi pas nous ? »’ 232 .

‘« Du coup, il y a une espèce de superposition de la géographie des écoles privées d’agriculture dans les Facultés Catholiques. »233.’

Sur le plan intellectuel, l’I.S.A.R.A. est redevable à l’École supérieure d’agriculture d’Angers. Eloi Laget, ancien directeur des études de l’E.S.A. d’Angers, est nommé directeur de l’I.S.A.R.A. Il donne la dimension du projet en définissant le profil de l’ingénieur I.S.A.R.A., (document remis à la Commission des Titres en 1973).

‘« L’ingénieur I.S.A.R.A. est : homme de science par l’étendue de ses connaissances, par la maîtrise d’un raisonnement méthodique, rigoureux et logique, par son aptitude à l’observation, l’analyse et à la synthèse, par le sens de la recherche et par une curiosité toujours en éveil. Homme de réflexion et d’action, il est capable de traduire sa science dans la réalité des faits, il a le sens du concret, complété par des aptitudes à la créativité et à la décision. Homme de relation, il est non seulement apte à réaliser les promesses de la science, mais il est également apte à les mettre à la portée des hommes et à traduire dans un langage approprié les techniques qu’il emploie et les solutions qu’il propose. Cela suppose l’esprit d’équipe, la qualité de l’expression orale et écrite et le souci de la relation humaine. »’

Reconnu établissement d’enseignement supérieur par arrêté du ministère de l’Agriculture en date du 15 septembre 1969, l’I.S.A.R.A. est, depuis 1974, habilité à délivrer le diplôme d’ingénieur en agriculture, diplôme reconnu par la Commission des Titres d’Ingénieurs (« J.O. », 28 mai 1974).234

Notes
227.

« Chronique universitaire », Bulletin des Facultés Catholiques, Lyon, 1967, n° 43, p. 75.

228.

C’est ainsi que la Faculté de Droit put revivre par l’Institut Social Industriel qui, en 1972, devenait l’Institut des Sciences Sociales Appliquées (I.S.S.A.), l’Institut des Sciences de la Famille (I.S.F.) et Croissance des Jeunes Nations. La Faculté des Lettres et des Sciences Humaines assura son développement par les écoles et les instituts : l’Institut Pierre Gardette (Institut de Langue Romane), l’École Supérieure de Secrétaires-Traductrices (E.S.S.T.) et le Centre de préparation du diplôme pour étrangers délivré par l’Université de Cambridge.

229.

HOESTLAND (H.) : Bulletin des Facultés Catholiques, Lyon, 1968, n° 45, p. 95.

230.

Entretien n°2, 1995.

231.

Entretien n°7, 1995.

232.

Entretien n°8, 1990.

233.

Entretien n°8, 1990.

234.

« Chronique de huit années (1969-1977) », Bulletin des Facultés Catholiques, Lyon, 1977, n°47, p. 10.