- L’étude approfondie du fonctionnement d’une exploitation devient optionnelle

L’insertion de nouvelles disciplines dans l'enseignement répond à la nécessité d’offrir des perspectives professionnelles plus larges. Avec leur introduction, surgissent, à plusieurs reprises, des questions touchant à la place des enseignements ou des mises en situation dans le cursus. Les débats sur la place du « cas concret » apportent un premier éclairage sur le rôle que l’école veut donner à l’enseignement agricole.

Au cours de l’année 1987, en prolongement des travaux sur l’organisation des cinq années d’études, la commission « Cas concret », rassemblant la plupart des membres du département « sciences et techniques de la production agricole », souhaite que l’opération ‘« étude approfondie d’une exploitation agricole, pièce maîtresse de l’enseignement » ’ 498 ait lieu en quatrième année et fasse suite à l’étude socio-économique. Les raisons mises en avant font appel au principe de cohérence ‘: « il est souhaitable dans toute formation qu’il n’y ait pas de rupture dans la progression d’un enseignement. Une concentration trop importante de « techniques » en troisième année va à l’encontre de cet objectif. »’ 499

Cette demande déclenche de vives polémiques, en particulier entre agronomes et sociologues. En modifiant le système de dépendance mutuelle entre les enseignements d’agronomie et ceux de sociologie, elle remet en cause, de manière implicite, la hiérarchie entre les savoirs, car elle change l’ordre précédemment établi : sciences fondamentales, agronomie et disciplines techniques, puis sciences économiques et sociologie.

Le changement souhaité trouve son sens au regard des évolutions récentes du cursus. L’élargissement du champ cognitif et le positionnement en fin de cycle des enseignements tournés vers l’entreprise apparaissent défavorables aux enseignements agricoles, essentiellement situés en troisième année. Le « cas concret d’exploitation » risque donc d’être perçu comme une opération secondaire dans la formation de l’ingénieur I.S.A.R.A. et de perdre une partie de son prestige. La hiérarchie entre disciplines, mais aussi entre les mises en situations, exprimée en particulier par la position dans le cursus, porte l’empreinte de choix professionnels plus ou moins explicites. Une manière de renouveler l’intérêt et le prestige de l’étude approfondie de l’exploitation agricole serait de la placer parallèlement aux enseignements liés à l’entreprise, c’est-à-dire en quatrième année.

Au terme de longues discussions, la direction décide le maintien de l’étude socio-économique entre la troisième et quatrième année, avant tout pour des raisons d’ordre pratique,500 et demande de modifier l’organisation du « cas concret ».

L’étude approfondie de l’exploitation agricole sera désormais envisagée en deux étapes : la première, placée en troisième année, concerne les diagnostics partiels (diagnostics du système de culture et du système d’élevage) et fait suite aux enseignements dispensés en deuxième et troisième années, tandis que la seconde, le diagnostic global de l’exploitation, basé sur l’approche systémique, est reporté en quatrième année (diagnostics économique et global).

Pratiquement, le diagnostic global de l’exploitation a été optionnel dès sa mise en place (1989), les étudiants pouvant choisir entre l’analyse systémique de l’exploitation ou un travail personnel sur un thème de leur choix. Il était désormais admis qu’un certain nombre d’étudiants (dans les faits, près de 80%) pouvait se dispenser de l’apprentissage des méthodes d’analyse du fonctionnement d’une exploitation agricole.

Le rôle central des enseignements agricoles dans le curriculum est controversé, sans qu’il soit encore possible de parvenir à un consensus sur la place à lui donner.

Notes
498.

Travaux de la Commission « Cas Concret », I.S.A.R.A., 1987, 2 p.

499.

ibidem.

500.

L’étude socio-économique se déroule sur une période de onze à douze mois, allant de la recherche des sujets à la restitution des résultats de l’étude au commanditaire.