3.2.3 - Un nouveau découpage des savoirs

A partir de 1993, le nouveau cursus de l’ingénieur I.S.A.R.A. est présenté sous trois grandes rubriques : la base de la formation, les lieux d’application et les lieux d’approfondissement.

La base de l’enseignement concerne les connaissances fondamentales de la partie biologique du cycle du produit agricole. Cela inclut les sciences biologiques, une partie de la chimie et de la physique ainsi que les connaissances fondatrices des technologies correspondantes utilisées en production et en transformation.524

Ayant acquis la base, dispensée principalement en première et deuxième années, les étudiants utiliseront toutes leurs connaissances dans les différents lieux d’application. Ensuite, ils pourront approfondir ces acquis, en cinquième année, dans l’un ou l’autre des domaines d’application : la production agricole, l’entreprise et l’agro-alimentaire, l’aménagement et le développement rural.

Ce schéma tend vers le modèle « deux années préparatoires et trois années de cycle ingénieur ». Il remet en cause la logique du curriculum précédent (quatre années de tronc commun d’une formation polyvalente et pluridisciplinaire et une année d'approfondissement) et rapproche le cursus de l’ingénieur I.S.A.R.A. de celui des ingénieurs d’application, sans que cela soit précisément énoncé. Sa mise en place soulève de nombreuses questions : le niveau scientifique et technique à atteindre dans les disciplines qui constituent la base de l’enseignement, la cohérence d’ensemble, les liaisons entre les différentes disciplines et départements, la place des sciences sociales. Par ailleurs, la faible prise en compte de thèmes transversaux tels que les filières, la qualité, l’environnement, est plusieurs fois soulignée au cours des discussions.

Le contenu et le volume horaire des enseignements d’agronomie et de zootechnie seront analysés dans le détail, l’objectif étant de préciser ce qui relève de la base de l’enseignement, de l’application ou de l’approfondissement. Cela aboutira à une réduction drastique des enseignements pour la partie tronc commun (moins 30% du volume total, le faisant passer d’environ 743 heures à 550 heures).

Un enseignement de technologies agro-alimentaires est introduit en troisième année, ainsi que des enseignements optionnels, dès la quatrième année (gestion des entreprises, gestion de l’environnement, etc.).

Les principes de l'évaluation et les modalités de passage d'une année à l'autre constituent des questions qui feront partie de prochaines commissions de travail. Les mises en situation pour apprendre ont été maintenues, y compris les deux stages en exploitation agricole, mais il s'agit d'un accord provisoire.

L’ingénieur I.S.A.R.A. peut intervenir à différents niveaux de la filière agricole : la production, la transformation ou la vente. Ses fonctions peuvent être multiples et diverses. Plus que jamais, la terminologie « ingénieur en agriculture » correspond à un titre et non plus à un métier.

Les transformations successives du curriculum ont entraîné sa mutation. Curriculum intégré lors de la fondation de l’école, il est resté, pendant quelques années, centré sur l’étude du fonctionnement de l’exploitation agricole. Les changements plus récents ont modifié la hiérarchie entre les disciplines, leur degré de compartimentation et l’organisation du savoir. Les sciences fondamentales, qui donnaient naguère les bases indispensables à l’enseignement des disciplines spécifiques à l’ingénieur en agriculture, acquièrent une autre fonction. La place marginale attribuée à l’analyse systémique de l’exploitation agricole confère aux sciences de la nature et de la vie un nouveau rôle. Elles sont garantes de la formation théorique de l’ingénieur I.S.A.R.A. Le modèle des sciences expérimentales est désormais le seul paradigme qui peut donner une cohérence épistémologique au curriculum.

Tous les étudiants disposent de la même base, mais ne choisiront pas les mêmes lieux d’application et d’approfondissement. Les questions soulevées sont celles du choix des matières et des contenus de l’enseignement de la base, des niveaux à atteindre pour tous, de la place des stages en exploitation agricole et de la place des sciences sociales.

Le type de code du savoir reste toujours très éloigné d’un code sériel, dans la mesure où la finalité de la formation est l’acquisition de compétences. Néanmoins, les changements ont augmenté le degré de compartimentation entre les secteurs ainsi qu’entre les enseignements et les mises en situation, ce qui modifie la manière de relier connaissances et compétences.

Notes
524.

« Evaluation du cursus, La base de la formation », I.S.A.R.A., 1992, p. 1.