Conclusion Sur L’efficacité Du Processus De Guérison À Prh

A la lumière des analyses précédentes concernant ce processus de guérison, nous pouvons conclure que si ce phénomène que nous préférons appeler « soin », ou « gestion des souffrances » a une efficacité certaine et s’inscrit logiquement dans le travail de développement personnel PRH, il n’est pas universel et ne constitue pas l’unique voie d’accès à une harmonisation du psychisme.

Un sujet nous propose ainsi en conclusion une analyse pertinente de ce type de travail thérapeutique, mettant en exergue à la fois ses qualités et ses limites propres :

« Il y a des individus pour lesquels la parole est très chargée symboliquement, où elle est vraiment une porte d’entrée dans l’univers interne des sensations et il y a des individus pour lesquels je ne crois pas que ce soit le meilleur moyen. Donc la parole peut parfois fonctionner comme un écran....Je crois qu’à PRH il y a de bonnes choses pour une évacuation de souffrance, en tout cas un processus de réactualisation et de remise en ordre d’un arrière fond blessé et difficile mais je pense que le recours unique à la parole, à la verbalisation des sensations pour y arriver c’est insuffisant dans bien des cas. Du coup il y a le problème de jusqu’où on ne s’illusionne pas... » (M. 11).

Au demeurant, quand une personne entreprend un travail sur son passé, pour tenter de se libérer des mauvais comportements que celui-ci a induit dans sa vie, l’objectif visé est de guérir des entraves à son déploiement personnel et à l’actualisation de ses potentialités. Ainsi, certaines attitudes ne sont pas fondamentalement gênantes dans la réalisation d’un projet personnel. Vouloir tout éradiquer semble d’une part illusoire, et peut se révéler vain ou inutile.

Comme le précise Michel LAMARCHE, ‘« PRH n’a pas pour créneau spécifique la psychopathologie et sa finalité n’est pas focalisée sur la guérison de problèmes d’ordre psychologique, ce qui est la caractéristique de la psychothérapie « classique » PRH est avant tout une formation humaine qui s’adresse à toute personne désireuse et capable de travailler sur elle (...) La guérison, telle qu’on en parle à PRH, est considérée comme une étape de la croissance d’une personne. Durant cette étape, le travail se porte sur les racines de ce qui l’empêche de prendre toute son envergure afin qu’elle se libère de ses entraves et puisse de déployer à plein »’ 265.

En outre la notion même de guérison se révèle complexe et ambiguë : d’une part le travail psychologique sur les phénomènes relatifs au passé d’une personne ne se commande pas et survient quand la personne est en mesure de les affronter, d’autre part ce regard en arrière comporte des risques qu’il est utile de connaître si on veut tenter de les éviter. Citons rapidement quelques uns de ces pièges :

« On peut inconsciemment entretenir son image de victime de son passé à cause des avantages qu’on en tire. Cela permet de se plaindre ou de se faire plaindre, de quêter indéfiniment l’affection qui a manqué... Cela fait aussi reculer la décision de se prendre soi même en charge.
On peut se dérober à ses responsabilités d’aujourd’hui et ne pas assumer les conséquences de ses fonctionnements négatifs en prenant son passé comme excuse Par exemple, « je suis agressif dans certaines relations, ce n’est pas de ma faute, cela vient de la relation à mon père ou à ma mère ». Au nom de cela on impose plus ou moins aux autres l’obligation de nous supporter, de nous comprendre. S’enfermer dans de telles façons de faire n’est pas adulte.
Enfin, rappelons qu’il ne suffit pas de s’expliquer ses difficultés d’aujourd’hui par son passé. Cela permet dans un premier temps de mieux se comprendre. Quand on se comprend mieux , on peut déjà mieux gérer sa vie. Reste qu’il faut envisager le travail des évacuations de souffrance qui , seul, libère en profondeur »
266 .

Les formateurs PRH ont senti l’importance d’aider les personnes de façon très suivie durant ces étapes de « guérison » des souffrances du passé, qui reste un tournant particulièrement délicat à négocier dans un cheminement psychologique.

Conscients de plus en plus des dangers et des pièges inhérents à un tel type de travail sur soi, ils ne pressent jamais les personnes à s’y engager tant que celles-ci n’ont pas acquis suffisamment de solidité intérieure.

C’est pourquoi à PRH l’axe de la croissance demeure prioritaire dans les parcours individuels des participants. La guérison n’intervient que dans un second temps et doit rester au service de l’épanouissement des individus. De plus, le schéma de la personne propre à la pédagogie PRH part d’une observation de l’homme sain. Le terme même de guérison tendrait à supposer que la personne devrait se soigner car subissant une pathologie quelconque. Or, de même qu’il paraît délicat de prétendre être à jamais libéré d’un comportement négatif, il semble illusoire de vouloir atteindre un état de perfection et de sérénité absolue.

L’important est de travailler à se libérer en priorité de ce qui, selon le langage PRH, « entrave la croissance de l’être » de la personne.

La phase d’approche des souffrances du passé n’a de sens que mise en perspective avec un projet de vie, dans lequel la réalisation des qualités personnelles se révèle la clef d’un bonheur partagé avec d’autres, et orienté vers l’amélioration de la société toute entière.

Notes
265.

Ibid. p. 24.

266.

Apport n° 77, session « Libération des freins et des entraves à ma croissance », Novembre 1991.