B. L’unité Symbolique Reconstituée

1. La Cohérence Retrouvée

Pour la quasi totalité des sujets (dix-neuf), PRH a eu une fonction unificatrice évidente dans leur vie, leur permettant de redonner du sens à cette dernière et d’en mettre en cohérence les différentes aspects (relationnel, familial, professionnel, religieux).

Nous avons désiré cerner de quel ordre était cette « unité » apparue grâce au travail PRH, et comment celle-ci s’était concrétisée.

Nous avons répertorié quatre groupes de réponses, qui montrent à la fois les différentes réalités que recouvre cette notion d’unité, et explicitent en quoi PRH a participé à leur établissement.

La première réponse, citée neuf fois, évoque une réalité longuement analysée dans notre chapitre concernant les notions d’agir essentiel et de vocation à PRH. Ces personnes constatent en effet que la pédagogie à l’oeuvre, (notamment par la relecture de vie et l’attention particulière à l’être qu’elle propose), conduit à des ajustements entre leur identité et leur activité, participant à une réconciliation entre leurs aspirations et leur personnalité :

« Chacune de mes évolutions internes a généré un bien être général, ça a fait bouger l’unité de la personne » (M. 6). ’ ‘ « Il y a eu une mise en cohérence énorme entre mes aspirations profondes et mes comportements (...) Un sentiment très fort d’unité et de pouvoir vivre tel que je suis avec qui que ce soit. (...) La vie que je vis aujourd’hui est riche des diverses expériences que j’ai vécues, et que toute cette avancée psychologique, spirituelle, relationnelle, professionnelle, tout ça me fait progresser, me fait avancer dans ce qui est le sens de ma vie » (M. 15).

Au demeurant, c’est toujours cette pédagogie unificatrice qui autoriserait les sujets (huit d’entre eux souscrivent à cette explication), à harmoniser leur vie familiale, relationnelle et professionnelle, autour de valeurs essentielles :

« C’est par l’intermédiaire des différentes approches de la personnalité (...) une schématisation très simple (...) qui a permis, en différenciant les aspects, de leur permettre de retrouver une unité après coup et puis un lien entre ce que je suis, ce que je fais, par l’intermédiaire de questions qui partent d’une réalité, de faits qui étaient ceux de ma vie pour en revenir aux fondements, aux valeurs qui les fondent, (...) pour mes actions futures. Dans ce va et vient dans une introspection des causes et des conséquences en termes d’actions » (M. 5). ’ ‘ « C’est l’aspect le plus important dans la mesure où avant je pouvais dire que j’avais une vie professionnelle et une vie privée qui n’avait rien à voir (...)Toute ma vie s’est restructurée autour de la vie relationnelle et de la croissance de l’individu et du groupe. Oui, les mots de cohérence et d’unité. Avant j’étais en morceaux. Toute la force et l’énergie qui se sont dégagées et qui m’ont amené à changer d’entreprise et changer de métier » (M. 17).

De même, la force symbolique de PRH, notamment dans le schéma de la personne, aurait, selon trois d’entre eux, une grande influence sur l’appréhension générale de soi même, des autres, et de l’environnement, et serait rendue possible par le processus de « rassemblement » de la personnalité qu’elle produirait :

« Qu’il y ait une fonction unificatrice autour d’un symbolique (...) je crois que c’est la visée d’André ROCHAIS (...) Ce qui a fonctionné pour moi très fort dans les premiers temps comme support de cette unité symbolique c’est le schéma de la personne. (...) tout ce que je vivais, tout ce que je ressentais ou qu’il fallait que j’explique dans mon passé, hop, c’était immédiatement rapporté à ce schéma. (...) Je le faisais même fonctionner dans ma tête et je faisais mes petits dessins animés » (M. 11). ’ ‘ « Cette découverte de cette plénitude de vie, cette vie qui n’est pas forcément anarchique en moi, que je vivais comme parties détachables et là il y avait une espèce de rassemblement et ça a été très important, j’avais l’impression de recoller les morceaux » (M. 18).

Enfin, deux sujets tiennent à mettre en avant le développement de la maturité affective que provoque PRH, favorisant la capacité de choix de la personne, et lui ouvrant le champ de sa liberté fondamentale. PRH apprendrait à suivre sa conscience et à vivre en référence à soi plutôt qu’à des modèles extérieurs :

« Je n’ai pas fini de trouver cette unité. Aujourd’hui quand je relis ma vie, je vois qu’elle s’axe par des décisions, des événements, des décisions que j’ai prises qui vont prendre un certain sens. (...) C’est pas PRH, je suis témoin de quelque chose avec une méthode. Je fais pas de reconstitution sur un modèle qui existe puisque c’est ma vie » (M. 2). ’ ‘ « C’était la première fois que j’ai perçu un cheminement psychologique possible pour moi dans ma manière de me situer par rapport à moi même, à mes parents, à mon milieu, et de passer par différentes étapes, de défusionner vers une autonomisation » (M. 5).

L’unique sujet qui récuse toute fonction d’unification à PRH, prétend en revanche que cet outil l’a projeté dans un idéal de vie et de personnalité qui a faussé son rapport au réel.

Ces réponses globalement très positives viennent confirmer les conclusions auxquels notre analyse des référents théoriques nous avaient conduit. C’est avant tout le système explicatif et la didactique qui lui est liée qui produiraient une telle cohérence dans la vie des sujets.

En outre, la plupart d’entre eux (dix-huit), confirme également que PRH les a aidé à trouver ou retrouver un sens à leur existence. Nous avons vu combien cette formation était finalisée autour d’axes précis et déterminés, et cette observation ne vient que renforcer notre conviction que PRH fait d’abord oeuvre d’éducation auprès des personnes adultes, avant de les amener à un travail psychologique sur elles mêmes.

Nous avons déterminé là aussi six catégories de réponses, visant à déterminer le sens les personnes ont donné à leur vie, grâce à PRH.

Certaines réponses se recoupent nécessairement, une tonalité profondément altruiste se dégageant des propos des personnes.

Six sujets affirment être entrés, grâce à PRH, dans la perception que toute vie humaine a du prix, et est orientée par des finalités à chercher et à trouver ; le sens de la vie s’assimilerait ainsi à une direction générale à découvrir jour après jour, en s’appuyant sur son identité. La prise de conscience essentielle faite par nos sujets se fonde sur la conviction que le sens de la vie se dévoile progressivement, en parallèle à l’émergence de l’identité de chaque personne. Le sens ne serait donc pas indépendant d’un travail d’introspection mais y participerait pleinement, et contribuerait en outre à valoriser ce dernier. Le but du développement personnel tel que PRH l’entend ne se réduirait pas à un objectif individualiste, mais comprendrait au contraire une vision sociale et altruiste d’importance majeure :

« A partir du moment où il y a cette unité qui se fait il y a un sens. Le sens c’est que ma vie a du prix (...) Prendre conscience de ça : j’existe donc j’ai des choses à faire dans ma vie et je sens que c’est aussi la direction qu’on a à prendre, le mouvement de ma vie n’est plus arrêtée, c’est la vie qui redémarre » (M. 18). ’ ‘ « Le sens n’est pas abouti, le sens c’est une direction, ma vie au lieu de partir dans tous les sens, est en train peu à peu de s’organiser entre des pôles centraux, des pôles secondaires, donc va dans une direction unique qui est ma vie (...) C’est une plus grande cohésion, homogénéité » (M. 2).

Ainsi, cinq sujets ont défini le sens de leur vie comme le sens d’une responsabilité éducative, consistant à aider les autres à trouver leur identité et leur « vocation », comprise comme le lieu de leur accomplissement personnel :

« Le sens c’est essentiellement de contribuer à mon tour à faire ce qu’a fait PRH sur moi, c’est à dire l’éveil de chaque être humain à son identité spécifique propre, et l’éveil de chacun à ce pour quoi il est fait » (M. 17).

Cinq sujets également insistent sur le sens spirituel que PRH les a conduit à découvrir, et qu’ils nomment amour de l’autre, dépassement personnel et ouverture à une transcendance :

« Je suis heureuse de vivre. Il y a aussi ma foi qui m’aide beaucoup, qui donne un sens à ma vie énorme » (M. 16). ’ ‘ « Le sens se trouve plus dans ma relation à Dieu qu’à moi-même. Le sens de ma vie : vivre et aimer » (M. 12).

Trois autres évoquent en outre un sens spécifique, celui de la responsabilité collective à l’égard d’autrui et de la société :

« Sentir ma responsabilité, (...) pouvoir accueillir les autres comme ils sont. Dans une harmonie de la société, des milieux dans lesquels je me trouve, prendre ce qu’il y a de bon et faire mon chemin, ne pas avoir un pouvoir sur tout le monde, ne pas désespérer des autres et de moi-même » (M. 8). ’ ‘ « Le sens de ma vie : je crois que je suis un homme responsable face à la société (...) je serai actif dans ma vie sociale parce que je fais partie d’un groupe d’hommes que j’ai besoin de voir évoluer, avancer» (M. 6).

Prolongeant la première définition et la développant, trois sujets ont aussi mis en avant le sens de l’unité entre l’identité pressentie et l’action, qui se double d’un souci de cohérence et d’authenticité avec soi-même et avec autrui :

« PRH m’a permis de réaliser ce à quoi j’aspirais. Je souffrais très fort d’un manque de sens dans mes relations affectives (...) j’aspirais vraiment à quelque chose de juste et c’est devenu possible (...) La session « mon agir essentiel », m’a aidée à orienter ma vie, à lâcher le monde des enfants - j’étais éducatrice -, pour devenir conseillère conjugale » (M. 9). ’ ‘ « Cette dimension d’unité entre ce que je suis et ce que je fais, je crois que ça participe d’un sens. Ne pas être une personne avec différentes masques ou personnalités, qui se joueraient en fonction des différents théâtres de ma vie, mais dans cette tentative de vérité, de cohérence sur moi par rapport à ce que je fais » (M. 5).

Enfin, pour deux sujets, la découverte du sens de l’autre a été fondamentale, la relation avec soi-même ouvrant sur l’exigence et la nécessité de la relation à autrui :

« ç a a aussi donné un sens à ma vie, qui est de laisser grandir l’amour en soi, pour le vivre, pour le donner, ça m’a décentré de moi, ça m’a tourné vers l’extérieur, vers les autres et je crois que le sens de ma vie c’est d’être tournée vers l’autre, vers le monde, d’aimer ! » (M. 3).

Une personne affirme néanmoins qu’elle n’a pas encore trouvé le sens de sa vie, et qu’elle le cherche encore, quand une autre précise que PRH l’a simplement aidée à vivre d’avantage en accord avec le sens de sa vie, déjà trouvé auparavant :

« J’avais l’impression de l’avoir déjà (...) ça m’a aidé, et m’aide toujours à me connecter sur le sens de ma vie (...) à être cohérent avec ce sens là (...) contribuer à ce que cette planète soit meilleure » (M. 20).

Nous pouvons donc conclure que la formation PRH, elle même axée sur des finalités déterminées, permet aux personnes de s’approprier leur histoire individuelle et d’orienter leur vie dans une direction qui leur convient, et qu’elles découvrent progressivement.