3. “l’amorevolezza” Ou La Bienveillance Inconditionnelle

Ainsi DON BOSCO tenait l’Amorevolezza (l’amour exercé à la mesure de l’autre), pour le principe premier de sa pédagogie.

Lors d’un colloque inter-universitaire sur sa méthode d’éducation370, le Professeur Sabino PALUMBIERI donna une interprétation personnaliste de cette pédagogie. En effet, tout comme MARITAIN et MOUNIER, Don Bosco affirmait la ‘« primauté du spirituel »’ et aurait pu faire sienne cette position de MOUNIER :

« L’échelle des valeurs est pour nous la suivante : primauté du vital sur le matériel, des valeurs de culture sur les valeurs vitales, mais primauté sur elles toutes, de ces valeurs accessibles à tous dans la joie, la souffrance, l’amour de chaque jour, et que selon les vocabulaires nous appellerons, en donnant aux mots une force qui les sauve de l’affadissement : valeurs d’amour, de bonté, de charité » 371 .

DON BOSCO appuyait son système d’action éducative sur l’amour, et si aujourd’hui une telle position nous semble relativement courante, elle ne l’était pas en cette fin de 19éme Siècle. DON BOSCO était novateur dans la pédagogie catholique de son époque et cette conviction salésienne n’était pas en résonance avec la pédagogie des jésuites qui conjuguait savamment les thèmes de la répression tempérée, de l’honneur et de l’émulation :

« Il reste que, (...) la pensée de DON BOSCO a été peu perçue. (...) son manque d’argumentation méthodique comme le laïcisme qui marque, ou aveugle, la vision française de l’histoire de la pédagogie se sont paradoxalement associés pour sa marginalisation » 372 .

C’est donc bien l’amour seul qui peut appeler ‘« un non être à l’être »’ 373.

La conviction de Don Bosco était que ‘« dans chaque jeune, même le plus malheureux, il existe un point accessible au bien : le premier devoir d’un éducateur est de découvrir ce point, cette corde sensible et d’en tirer parti »’ 374.

L’amour est donc ‘« cette force qui pousse chaque être à insérer son effort dans une matérialité pour se réaliser »’ 375.

Il devient par là une des dimensions fondatrice de la vie personnelle. Il sous tend toute action et toute contemplation car la liberté et l’amour semblent les valeurs piliers de la vie spirituelle donc de la vie personnelle.

Notes
370.

Jean BOSCO (1815-1888), d’origine très modeste, devenu prêtre, vit affluer à Turin, lors de la révolution industrielle naissante, des enfants et des adolescents désemparés, en proie à l’exploitation ou à la délinquance ; il conçut pour eux une pédagogie novatrice qui fit l’objet d’un colloque inter-universitaire qui s’est tenu à LYON du 4 au 7 avril 1988 et dont les actes ont été publiés : Education et Pédagogie chez Don Bosco, présentation par G. AVANZINI, Paris, Ed. Fleurus, 1989, 347 p.

371.

E. MOUNIER, Révolution Personnaliste et Communautaire, in Oeuvres complètes, Tome I, Paris, Seuil, p. 216.

372.

G. AVANZINI, L’Ecole d’hier à demain, Toulouse, Ed. Erés, 1991, p. 135.

373.

Sabino PALUMBIERI, « Essai d’interprétation personnaliste de la pédagogie de Don Bosco », in Education et Pédagogie chez Don Bosco, op. cit., p. 174.

374.

G.B. LEMOYNE, cité par S. PALUMBIERI, Jam. cit., p. 174.

375.

J. LACROIX, Personne et Amour, op. cit., p. 13.