Education nouvelle et science

Dans l'éditorial qui présente le résumé des communications, le sujet étudié à Heidelberg, qualifié d'unique en son genre, est développé de cette manière : ‘« construction d'un avenir meilleur pour l'humanité : l'éducation mise au premier rang comme seul moyen de préparer une génération plus saine, plus forte, plus équilibrée ; l'éducation fondée sur la science, c'est-à-dire la recherche d'une théorie et d'une pratique qui se distinguent radicalement des notions traditionnelles, programmes et méthodes en usage aujourd'hui presque partout ! »’ 118 Tout cela sous-entend deux postulats. Premièrement, dans un monde qui ne va plus de soi, l'éducation doit servir une régénération humaine, elle-même tournée vers la réalisation d'une ère nouvelle et meilleure. Deuxièmement, la seule solution envisageable est de fonder l'éducation sur la science parce qu'elle seule peut dire comment libérer les énergies créatrices chez l'enfant.

Pour bien saisir l'enjeu d'un tel congrès, il n'est pas inutile de remonter aux premières formulations du sujet. En juillet 1924, il s'agissait de traiter un problème bien particulier : ‘« Comment individualiser l'enseignement dans les classes nombreuses en permettant à l'enfant de manifester son activité créatrice seul ou en groupe ? »’ 119 ; en janvier 1925, la formulation se condense mais le sujet prend de l'ampleur : ‘« Comment libérer l'énergie créatrice de l'enfant ? »’ 120 Entre juillet 1924 et janvier 1925, le problème est complètement renversé : de la résolution d'un "simple" problème de surcharge de classes qui gêne l'individualisation de l'enseignement et donc limite toute activité créatrice, on passe à la résolution d'un problème théorique, la libération des énergies créatrices, qui est d'ailleurs depuis Calais le but reconnu de l'Ecole active. Il ne faut pas oublier que la vocation première de la Ligue est de propagande et que l'enjeu "stratégique" de ces congrès est celui de l'extension de l'Ecole nouvelle à l'Enseignement public, et ce par l'Ecole active. Faire la démonstration que "c'est meilleur, possible et réalisable", voilà ce qui mobilise les personnalités actives du congrès d'Heidelberg.

Notes
118.

La rédaction, « Editorial », P.E.N., n°17, octobre 1925, p. 2.

119.

La rédaction, « Notre ligue », P.E.N., n°11, juillet 1924, p. 41.

120.

La rédaction, « Notre ligue », P.E.N., n°14, janvier 1925, pp. 1-2.