Un inconscient non éducable

A Heidelberg, Jung s'oppose à Mrs Ensor quand il dit : ‘« Je ne partage aucunement l'idée que l'homme est toujours bon en principe et que sa méchanceté n'est que du bien mal compris »’ 123. Ce qu'il refuse avant tout, c'est la particularisation de l'éducation qui, en expliquant les conduites individuelles par la psychologie analytique, les justifierait en même temps. Ce qu'il n'accepte pas, c'est faire de l'enfant un amalgame de forces inconscientes que l'éducation aurait la tâche de libérer.

Et pour éviter ce piège, il ne faut pas trop individualiser l'éducation. Au contraire Jung distingue trois genres d'éducation124 : l'éducation « par l'exemple » qui est l'éducation de base, l'éducation « collective » unifiante mais indispensable, celle qui agit selon des règles, des principes et des méthodes et l'éducation par la « méthode individuelle » qui doit demeurer l'exception et ne "traiter" que les cas particuliers (faibles d'esprit et malades). L'éducation est toujours un travail sur la conscience de l'enfant, le travail sur l'inconscient reste réservé aux spécialistes. La nature inconsciente de l'enfant n'est pas le terrain de l'éducation.

L'intervention de Jung peut apparaître en rupture avec la volonté des organisateurs de fonder la pédagogie sur l'apport des sciences psychologiques, mais Jung ne fait pas que s'opposer aux conceptions de Mrs Ensor, il essaie surtout de mettre en garde les tenants de l'Education nouvelle contre une application simpliste de la psychanalyse.

Notes
123.

« L'importance du subconscient dans l'éducation individuelle », P.E.N., n°17, octobre 1925, p. 11.

124.

Id., pp. 11-14.