Ferrière : ‘« Aime et travaille. Dieu fera le reste »’ ²¹⁰

Il n'y a pas pour Ferrière d'opposition entre liberté et discipline dès l'instant où la discipline n'est pas coercition mais autonomie, où l'ordre n'est pas imposé du dehors mais réalisé du dedans. Liberté et discipline sont indissociables : ‘« La discipline toujours plus serrée nous conduit à être libres, c'est-à-dire, selon le mot de Kant, esclaves de la vérité et du bien »’ ²¹¹. Confiant dans le progrès spirituel (de bien et de vérité) de l'humanité qu'il transpose à l'enfant, il reconnaît que si l'enfant manifeste d'abord de l'égocentrisme, celui-ci se résout tout naturellement en service du prochain, si les principes de l'Ecole active sont appliqués.

A la clôture du congrès, Ferrière est heureux de constater que tous sont d'accord avec lui pour considérer que la liberté est ‘« non un état statique d'indépendance, mais un dynamisme de libération »’ ²¹². Certaines limitations sont légitimes, l'important est de pouvoir les discerner des limitations oppressives. La liberté dont parle Ferrière est donc le résultat d'une libération jamais définitivement atteinte. Il est vrai que la grande majorité des personnalités présentes à Locarno peuvent s'y retrouver dans cette définition. Une réserve toutefois pour les Communautés scolaires de Hambourg dont Lottig s'était fait le porte-parole pour dire que la vraie liberté apparaît quand le maître s'abstient de toute intervention arbitraire et qu'il laisse ‘« le champ libre à l'expression spontanée et constructive de l'enfant »’ ²¹³.

Si la liberté est d'abord l'expression d'un besoin, et Ferrière met en garde contre la tentation d'en faire un déterminisme en assimilant l'homme à un mécanisme, l'effort de libération réside dans un travail sur soi, un travail d'ordre moral et spirituel dont l'homme ne connaît pas exactement l'aboutissement et qu'il résume ainsi : ‘« Aime et travaille. Dieu fera le reste »’.