Liberté, conquête de soi

Se constituer en personnalité libre est la tâche humaine par excellence pour Bertier, et en même temps le but de toute éducation. Cette liberté-là est conquête de soi-même par soi-même. Est libre et devient libre celui qui décide de le devenir et qui fait en sorte de le devenir. Bertier fait la description de cette "conquête de soi" : se développer physiquement et psychiquement et se choisir un idéal. ‘« Quand une personne ne fait plus qu'un avec son idéal (...) elle devient un caractère, et c'est là une éducation totale »’ 348. Le caractère est manifestation de liberté en la personne, car une personnalité libre est d'abord une personnalité moralement libre.

Liberté et personnalité deviennent indissociables. Une liberté qui n'est plus forcément comme à Heidelberg le résultat d'un épanouissement, d'une libération d'une nature toute en "potentialités". Mais une liberté qui est le résultat d'une croissance, d'une libération sensée, le produit d'un équilibrage, d'un processus. Une conquête de soi très intérieure mais qui ne se fait pas sans aide extérieure, sans la médiation sociale qui, par les limites et obstacles qu'elle impose, permet à l'enfant cette sorte de prise de conscience de sa propre personne. C'est donc la personnalité qui est synonyme de liberté. On comprend alors que le premier rôle de l'école soit de voir éclore cette personnalité libre. Si les intervenants semblent à peu près d'accord sur les manifestations d'une personnalité libre, ils s'accordent beaucoup moins sur les moyens de la liberté. Un débat qui dépasse et de loin le simple usage de la liberté mais qui met au centre des discussions les convictions personnelles des orateurs et leurs choix de société.

Notes
348.

« La formation de la personnalité libre. Communication du M. Georges Bertier », P.E.N., n°121, octobre 1936, p. 240.