La sublimation, processus éducatif

Si la sublimation de l'instinct porte en elle-même une dimension morale évidente, il peut se produire que l'instinct primitif pourtant nullement sublimé ‘« prenne pour le sujet une valeur religieuse et qu'il soit considéré par lui comme un culte rendu à Dieu »’ 772. Ce qui ne permet pas d'en conclure que l'instinct combatif s'apparente à l'expérience religieuse. Bovet s'en explique : ‘« Il y a dans l'expérience des grandes religions et plus particulièrement dans celle du chrétien deux aspirations fondamentales, l'une vise à triompher du Mal, c'est un élément à base de lutte, l'autre à s'unir au principe du Bien, c'est un élément à base d'amour »’ 773. Bovet distingue deux tendances qui marquent la différence entre la morale, qui a pour objet de vaincre le mal, et la religion, qui pousse à aimer le bien. C'est bien pour cette raison que l'instinct combatif, de part sa propension à lutter contre le mal, est contenu dans l'expérience religieuse mais ne la résume pas, autrement dit, ‘« on peut voir dans la sublimation de l'instinct combatif l'élément moral de l'expérience religieuse »’ 774.

Après avoir remarqué dans un écrit antérieur que le concept de sublimation est plus d'ordre moral que psychologique, Bovet fait cette proposition : ‘« Si l'expérience chrétienne comprend deux éléments, l'un spécifiquement religieux : l'union avec Dieu, l'autre moral : la lutte contre le mal, on pourrait voir dans la sublimation de l'instinct combatif l'élément moral de l'expérience chrétienne par opposition à l'élément quiétiste qui serait, comme on l'a montré, la sublimation de l'instinct sexuel »’ 775.

Notes
772.

L'instinct combatif, op. cit., 1928, p. 145.

773.

Id., p. 152.

774.

Id., p. 154.

775.

« L'instinct combatif dans l'expérience chrétienne », R. T. P., 4, 1916, pp.102-103 (cité par J.-M. Martin, in Pierre Bovet, l'homme du seuil : Sa position par rapport à la pédagogie, à la psychanalyse et à la psychologie religieuse, Thèse de doctorat, Université de Genève, Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation, 1986, p. 113).