C. Les limites d'une conception religieuse de l'éducation morale

A Cheltenham, c'est moins l'éducation morale que l'éducation religieuse qui est en jeu, mais ce congrès pose avec acuité le problème de l'introduction de la religion dans l'école, et cela n'est pas étranger à la question de l'éducation morale. Ainsi, pour certains pédagogues favorables à la religion, le bénéfice moral qu'apporterait la religion aux enfants justifie son introduction à l'école. Leurs opposants soutiennent massivement le contraire et craignent avant tout l'endoctrinement d'une éducation à dimension religieuse. Cheltenham reste le congrès qui a vu s'affronter avec force ces positions contradictoires et que Jean-Michel Martin analyse de cette manière : ‘« Plusieurs tendances sont donc présentes à Cheltenham : le christianisme engagé (représenté par Bertier), un christianisme modéré et non institutionnel (Bovet, Katzaroff), un laïcisme social et socialiste (Wallon, Freinet, Loeb), qui, s'ils sont d'accord quant "au but à atteindre" (le bonheur de l'homme), ne sont pas d'accord quant aux modalités de l'action à poursuivre »’ 857. Et même si le rapport final du congrès insiste sur les points d'entente entre les différents protagonistes, il semble difficile de concilier ‘« la position religieuse la plus radicale »’ catholique, celle de Bertier, avec celle ‘« d'inspiration plus sociale »’ de Wallon et Freinet858. C'est chez ces derniers qu'on trouve le plus d'objections à l'assimilation de l'éducation morale dans l'éducation religieuse.

Notes
857.

J.-M. Martin, Pierre Bovet, l'homme du seuil : Sa position par rapport à la pédagogie, à la psychanalyse et à la psychologie religieuse, Thèse de doctorat, op. cit., p. 284.

858.

Id., p. 288.