D. Conclusion : La crainte de l'endoctrinement

C'est donc une triple dérive qui guette l'Education nouvelle lorsqu'elle fait alliance avec la religion, celle de la métaphysique face au rationalisme scientifique, de l'individualisme intrinsèquement négateur de la dimension sociale de la nature humaine, et enfin de la spéculation stérile qui apparaît dès qu'on tente d'apposer ou d'opposer morale et religion en éducation. A Cheltenham certains, comme Smelten, pensent ainsi que l'unanimité qu'appellent avec succès les lois morales semble bien difficile à obtenir pour la religion. C'est un fait aisément observable que les religions sont innombrables et ‘« C'est en vain que l'on maintient une association entre le mot "religion" et le mot "morale" »’ 889. L'éducation morale aura pour ambition d' « éveiller la conscience », et ceci quelle que soit la religion. Smelten s'insurge contre l'idée que des religions différentes puissent vouloir la même morale et il ne souhaite pas que la morale se fonde sur la religion. Les lois morales doivent unir les hommes entre eux alors que la pluralité des religions ne peut que les diviser. La position de Smelten pose les bases d'une laïcité qui s'impose de plus en plus au sein de la Ligue, c'est à cette seule condition que l'Education nouvelle peut espérer préserver une neutralité qu'elle revendique depuis toujours.

Notes
889.

« La religion, facteur de libération », in W. Rawson, op. cit., p. 59.