Conclusion

Contre l'éducation traditionnelle, l'Education nouvelle a su relever les racines individuelles de la morale, elle a également tenté de les développer par des médiations forcément sociales. Mais a-t-elle réussi à conjuguer ces deux aspects ? Les divergences de conceptions démontrent le contraire. Et la manière dont elle pose les termes du problème de la liberté ne lui permet pas de sortir du dilemme auquel se sont continuellement affrontés les pédagogues nouveaux, celui du fondement de la liberté dans la nature humaine et celui de sa construction sociale et solidaire. Il manque à l'Education nouvelle une conception dialectique de la morale et de l'éducation morale qui laisserait à chacun le soin de se développer dans le double dépassement de l'obéissance à la nature et de la construction de la communauté sociale, mais qui ne se satisferait ni du simple épanouissement individuel, ni de la réalisation d'une bonne cohésion sociale. Le garant de la liberté de l'enfant, absolument constitutive d'une pensée de l'éducation morale, reste cette reprise en mains autonome de sa propre éducation, dans le « se faire une oeuvre de soi-même » selon l'expression pestalozzienne. L'enjeu de l'éducation morale est cette autonomie que tous veulent pour l'enfant, mais que tous ont postulée au départ, alors qu'elle ne peut être que l'aboutissement de l'éducation.