2-3 La production officielle de données

Deux grands producteurs de données nous permettent de réaliser ce travail : le Ministère de la Culture et l’INSEE. L’un et l’autre proposent plusieurs enquêtes. La plus intéressante, abondamment utilisée, est celle réalisée par quatre fois (1973, 1981, 1988 et 1997) par le Ministère de la Culture 101 . Elle s'efforce de cerner l'ensemble des pratiques culturelles et de loisir des français. Les pratiques dites nobles (théâtre, danse, musique classique, visites de musée, de monument historique...) sont privilégiées, mais le bal public y est clairement identifié 102 et cerné, de même qu’un certain nombre d’autres pratiques dites populaires (les sorties au cinéma, dans une fête foraine ou un match de foot-ball par exemple).

Le problème vient de ce que, considérant le bal comme en voie de disparition, chaque enquête se révèle un peu moins précise que la précédente. Plus globalement, une stratégie plus modeste d’enquêtes ciblées semble se développer. La première concerne les jeunes 103 . Elle nous permet de disposer de données fraîches. D’autres devraient suivre. Comme l’enquête 97, elle est plus pauvre (un questionnaire limité au tiers des items) et présente l’inconvénient de parcelliser l’information. L’étude qui accompagne ces données se limite souvent à une simple lecture de celles-ci et ne tient que rarement compte des importants changements de comportements entre 12 et 25 ans... 104

Parmi les données que fournit l’INSEE on distingue celles relatives aux comportements et celles qui s’intéressent à l’équipement de chaque commune. Ces dernières sont connues par l'intermédiaire de l'Inventaire Communal, un peu ancien 105 , ou des résultats du recensement de 1990.

Moins intéressantes sont les autres données de l'INSEE. Non pas que je rabaisse l'illustre maison au rang d'une obscure officine de sondages électoraux : d’autres enquêtes déjà citées ou utilisées dans la suite de l’étude 106 n’ont pas sa fiabilité. Les problèmes tiennent à la définition de l’objet décrit et ses modalités. Cela obligera à utiliser ces données avec circonspection et à les rapprocher d’autres informations de nature ou de provenance différentes.

En effet, le principal problème tient au fait que le bal n’est jamais identifié en tant que tel mais englobé dans la danse 107 ; par recoupement avec d’autres données, on sait que le public des bals représente environ la moitié des danseurs mais c’est inégal selon les groupes ; ainsi cette proportion baisse nettement chez les jeunes, qui fréquentent d’abord les discothèques, quand elle augmente pour les plus âgés. Par ailleurs, une part conséquente du public du bal ne danse pas mais ne doit pas être négligée pour autant.

Un autre problème important se pose pour l’ensemble des données y compris pour celles fournies par le Ministère de la Culture. On peut en effet se demander si les catégories sociales telles qu'elles sont définies par l'INSEE sont toujours pertinentes en matière de géographie culturelle et sociale.

De même, la définition des ensembles urbains et du rural ne correspond pas à l’objet de cette recherche. Par ailleurs, un ouvrier qualifié d’une petite ville isolée aura-t-il toujours les mêmes comportements que celui d’une ville de même taille située dans une région très urbanisée? On n’évoquera même pas l’idée de comportements régionalisés dont le principe est contraire à celui des études nationales de l’INSEE...

Enfin, le principe même de ces présentations est critiquable : les études qualitatives mettent toutes en valeur une individualisation croissante des comportements ; l’agglomération de ces attitudes très disparates voire contrastées finit par produire des moyennes très vagues et parfois dépourvues de signification.

On voit donc que des données existent pour peu qu’on n’hésite pas à les chercher. Mais c’est leur caractère trop général qui nuit le plus souvent à leur pertinence. On peut regretter que le caractère marginal du bal empêche parfois un approfondissement qui serait apprécié. Cela explique que les principales données utilisées proviennent de la SACEM.

Notes
101.

Collectif. Pratiques culturelles des français. Description socio-démographique. Evolution 1973-81. Ministère de la Culture et de la Communication, Direction du développement culturel, Service des études et recherches. La Documentation française, 1982.

Collectif. Enquête sur les pratiques culturelles des français. Ministère de la Culture et de la Communication, Direction de l'Administration Générale et de l'Environnement Culturel, Département des études et de la prospective. La Documentation française, 1989.

DONNAT, O. (sous la dir.). Les pratiques culturelles des Français. Enquête 97. Ministère de la Culture et de la Communication, Direction de l'Administration Générale et de l'Environnement Culturel, Département des études et de la prospective. La Documentation française, 1997.

102.

Annexe 2

103.

Collectif (sous la direction de Guy, Jean-Michel). Les jeunes et les sorties culturelles. Fréquentation et image des lieux de spectacles et de patrimoine dans la population française âgée de 12 à 15 ans. Ministère de la culture. Direction de l'administration générale. département des études et de la prospective. La Documentation française. 1995. 192 p.

104.

Les autres enquêtes du Ministère de la Culture ne s’intéressent qu’à la population âgée de 15 ans et plus.

105.

Les premiers résultats de la nouvelle enquête, en cours, ne seront disponibles qu’au cours de l’hiver 98-99.

106.

CSA / CEVIPOF. L’espace rural. in HERVIEU, B. et VIARD, J. Au bonheur des campagnes (et des provinces). L’Aube, coll. Essai, 1996, p. 119-156.

107.

INSEE. Les pratiques de loisir. Enquête 1987-88. INSEE Résultats, n°3, 1989.