Les professionnels sont à l’origine d’un nombre réduit de bals publics et de repas dansants. Une des caractéristiques de notre époque c’est leur recul très important, on peut même parler de quasi disparition alors que ces professionnels avaient toujours joué un rôle majeur dans l’histoire du bal, inventant même le bal moderne.
Les données de la SACEM sont précises dans le cas des bals publics. Dans le cas des repas dansants, elles ne mentionnent pas le statut juridique de l’organisateur. A la place, elles précisent simplement si l’organisateur est sédentaire ou itinérant. Cette indication spatiale (carte 5) ne doit cependant pas être négligée. Comme les deux cartes coïncident assez sensiblement, cela laisse supposer que les mêmes traditions se retrouvent dans les deux situations.
On peut donc estimer que les organisateurs professionnels de bals publics sont en voie de disparition: ils organisaient un quart des bals dans l’après-guerre, 10% en 70, encore 4% vers le milieu des années 80. Mais ils sont balayés par la crise du bal au début de la décennie: 0,8% en 92 129 . Depuis, on assiste à une stabilisation à ce très faible niveau.
Ils ont supporté la conjonction de plusieurs facteurs: la construction de nombreuses salles des fêtes les prive d’un de leurs principaux atout, la fourniture du chapiteau, la tente, le fameux parquet où avait lieu la manifestation. Par ailleurs, le redéploiement actuel des populations se fait dans des campagnes où souvent ils étaient peu implantés. Surtout, les populations rurales modernisées ont adopté des formes d’organisation plus urbaines; le développement des associations en milieu rural est très important. Plus nombreuses, mais aussi plus solides, elles n’hésitent pas à prendre le risque de l’organisation d’un bal dont, en même temps, les coûts calculés en francs réels ont reculé.
Qui sont ces organisateurs ? Des professionnels qui proposent des manifestations d’assez grande ampleur. A l’origine, issus des parquets de danse de l’entre-deux-guerres, on y trouve aujourd’hui trois types d’organisateurs:
Bien que rares, on s’aperçoit (carte 4) que leur activité est surtout située dans les régions de l’ouest du pays, souvent sur des périmètres relativement réduits: dans la région SACEM de Bordeaux, en 1991, 3 délégations concentraient 190 séances sur 215; sur celle de Lyon, Roanne et Valence représentent les trois quarts des bals professionnels... Dans bon nombre de régions, ils ont presque disparu; ainsi dans le sud-est: sur l’ensemble de la région SACEM d’Aix-en-Provence, on passe de 4 séances sur 5587 en 1991 à 17 séances (dont 16 à Cannes) sur 5216 en 1997. Autre région où ils sont rares, le grand nord-est (1 seule séance sur 13 départements !) et le sud. Dans ces deux dernières régions ces professionnels n’ont jamais joué un rôle très important et leur recul semble avoir été précoce.
Dans le cas des repas dansants (carte 5) les mêmes tendances apparaissent. La quasi totalité ont des organisateurs sédentaires, c’est à dire originaires de la délégation, ce qui indique une relative proximité. Mais il n’est pas inutile de s’intéresser aux exceptions: les organisateurs itinérants dominent, ou ont, au moins, le mérite d’exister dans quelques délégations concentrées sur deux zones:
Mais ce dernier exemple amène aussi à signaler qu’il s’agit-là, en général, de régions où les repas dansants sont rares. Ils semblent donc s’être installé sur un créneau qui leur garantit une originalité, probablement limitée à quelques années.
Partout, même lorsqu’ils gardent une présence réelle comme en Aquitaine et Bretagne du sud, la situation de ces professionnels est fragile: ainsi dans cette dernière sont concentrées la plupart de leurs séances dans la région de Rennes; la SACEM recensait 65 séances en 1991, 104 en 95, 33 en 97. L’irrégularité indique bien à quel point l’activité semble marginalisée.
Toujours à Rennes, on s’aperçoit aussi que ces professionnels n’organisent en moyenne qu’entre une et deux séances annuelles, autant que les autres catégories d’organisateurs, municipalités et associations. Le recul est net puisqu’il y a vingt ans ils en organisaient en moyenne six 131 . La moitié d’entre elles étaient alors proposées par des entreprises importantes qui organisaient plus de 20 séances. Ils s’agissait des organisateurs qui réussissaient le plus souvent leur bal, en retirant des bénéfices substantiels 132 . Ce sont ces entreprises qui ont disparu, ne laissant subsister que quelques entités de plus petite taille qui subsistent en pratiquant des activités multiples comme dans le cas cité en Roannais.
L’aspect marginal de l’activité des professionnels explique qu’à l’exception de l’étude approfondie du réveillon du 31 décembre, on ne revienne pas sur eux dans la suite de l’étude. La presque totalité des repas dansants sont en effet organisés par des associations ou des municipalités.
Mais ce recul est exagéré aussi par la transformation (illicite) de beaucoup d’entreprises du second type en associations (voir note suivante). La part réelle est probablement deux à trois fois supérieure.
RENAULT, P. Op. cit.
Idem, pp. 65-68.