3-2-3 Les organisateurs municipaux

Ce n’est guère utile de s’attarder longuement sur les caractéristiques des bals municipaux: tout d’abord parce qu’ils s’opposent pour partie aux bals associatifs qu’on vient de décrire et s’en déduisent par contraste. Mais il s’agit aussi du type de bal majeur de l’étude et il serait donc vain d’espérer en épuiser le propos. Enfin, au contraire des associations, les municipalités françaises sont bien connues par ailleurs et sous des angles variés mêmes s’ils se révèlent très différents de notre approche 155 .

Les municipalités sont de grandes organisatrices de bals, souvent assez importants. Mais, du fait de l'existence de très nombreuses associations extra-municipales, ces communes disparaissent des statistiques: en 1995, en effet ne sont visibles que 757 bals organisés par les mairies sur un total de 14 459 dans le région de Bordeaux et 445 sur 16 002 dans celle de Lyon. D'autres pistes d'information sont donc nécessaires afin de les mettre en valeur. La principale provient des orchestres interrogés. Ils montrent que les bals municipaux, même organisés par un comité des fêtes ou une association écran ou relais, représentent plus de la moitié des bals.

Est donc utilisée dorénavant l’expression bal municipal pour désigner une manifestation à vocation collective pour l’ensemble de la communauté territorialisée (partie de commune, commune, plus rarement groupe de communes) ou qui s’efforce d’être représentative de l’ensemble de la population d’une commune.

En matière de droit, l’attitude est partout très pragmatique; c’est l’objectif à atteindre qui prime pour les organisateurs de ce type d'événements, le cadre juridique importe peu. Cela explique la multiplication des remarques à ce sujet de la part des Cours des Comptes Régionales qui ne parviennent pas à comprendre qu’une municipalité puisse être organisatrice ou associée à l’organisation d’une telle fête, voire même, suprême hérésie, qu’elle puisse financer un bal sur son budget.

Plus difficile à comprendre encore: que la municipalité puisse prendre dans certains cas, l’initiative du bal et ensuite demander aux bars situés à proximité de la place où il a lieu de participer au paiement du cachet des musiciens. Ce type d’arrangement, théoriquement libre, mais en fait très contraint pour les tenanciers de bars, s’accorde mal avec la rigidité de la régle juridique ou administrative.

On voit donc que là encore, comme dans le cas des associations, ce qu’on recherche c’est de la souplesse: il s’agit de permettre le fonctionnement d’un objet non identifié clairement car dans l’informulé, le flou. Cette institutionnalisation du territoire ressort du symbolique, mal pris en compte par la législation française. On l’estime nécessaire, indispensable et on fait en sorte de l’accorder avec une autre logique considérée ici comme secondaire mais contraignante; l’institutionnalisation est prioritaire mais incompréhensible à l’étranger des Cours des Comptes Régionales; c’est un bricolage aux marges de la légalité.

L’observateur se trouve donc souvent confronté au manque de traces nettes susceptibles de lui fournir une information précise, tant sur les associations que sur les municipalités.

Les mêmes remarques peuvent être formulées lorsqu’on s’intéresse à la musique et aux musiciens en particulier: cette “ambiguïté acceptée” 156 des hommes de l'art est celle du bal en général.

Notes
155.

RICHARD, P., COTTEN, M. Les communes françaises aujourd’hui. PUF, coll. Que sais-je?, 1983, 127 p. BROWAEYS, X., CHATELAIN, P. La France des 36 000 communes. Méthode et documents pour une étude locale du territoire. Masson, 1991, 345 p. PIATIER, A. et al. Radioscopie des communes de France. Ruralité et relations villes-Campagnes. Economica, 1979, 541 p.

156.

MARCHAN, F. Thèse . Op. cit. p. 199.