Les français dansent donc encore beaucoup: 160 000 bals par an, ce n’est pas rien. En moyenne, 1 bal pour 350 français de tout âge. Certes il y a beaucoup de bals, les perceptions de la SACEM en hausse semblent indiquer un succès croissant mais peut-on raisonnablement évaluer le public qui fréquente ces bals ? L'enquête du Ministère de la Culture de 1997 affirme que 30% des français vont au bal public au moins une fois dans l'année et celle de 1989 que, parmi eux, 23% y vont même cinq fois 236 .
Si on garde à l'esprit que les régions de très faible pratique -essentiellement l’agglomération parisienne-, les bals non répertoriés, les bals privés ou semi-privés et les français de moins de 15 ans pèsent d'un poids démographique important sur les moyennes nationales, on ne peut que répéter la conclusion de la première partie qui mettait en valeur l'aspect important de cette activité.
Le bal est une des principales activités de masse des français (tableau 3).
Depuis 1973, on constate une évolution divergente des deux principaux marqueurs de la pratique du bal. La pratique occasionnelle progresse lentement mais régulièrement, passant de 25 à plus de 30% des adultes. Sur la même période, l'opéra, pourtant plus prestigieux, n'en a attiré que 3%...
Dans le même temps, la pratique régulière (plus de 5 fois par an) régresse dans des proportions bien plus importantes de 1973 à 1988 et ce mouvement s’est probablement 237 poursuivi depuis: chez les jeunes, groupe d’âge le plus assidu, on semble assister à un effondrement de la pratique entre 1988 et 1994 238 . Le nombre moyen de bals fréquentés dans l’année passe ainsi de 8,5 en 1973 à 5 en 1988 239 (tableau 4). Elle reste cependant à un niveau élevé puisque l'enquête révèle que le quart des pratiquants (26% au lieu de 37% en 73) est dans cette catégorie. Mais l’importance de la variation sur un temps aussi court est considérable pour des comportements qui généralement n’évoluent que lentement.
Pratique dans l'année | Pratique régulière1 | ||||||
Evolution | 1973 | 1981 | 1988 | 1997 | 1973 | 1981 | 1988 |
% | % | % | % | % | % | % | |
cinéma | 52 | 50 | 49 | 49 | 58 | 60 | 53 |
fête foraine | 47 | 43 | 45 | 48 | 15 | 12 | 10 |
musée | 27 | 30 | 30 | 33 | 15 | 14 | 16 |
bal public | 25 | 28 | 28 | 30 +22 | 37 | 29 | 26 |
match sportif payant | 24 | 20 | 25 | 25 | 47 | 45 | 41 |
exposition d'art | 19 | 21 | 23 | 25 | 15 | 17 | 19 |
zoo | 30 | 23 | 22 | 26 | 4 | 6 | 6 |
théâtre professionnel | 12 | 10 | 14 | 16 | 25 | 17 | 15 |
concert de rock ou de jazz | 6 | 10 | 13 | 13 | 15 | 21 | 22 |
cirque | 11 | 10 | 9 | 13 | non significatif: 2 | ||
concert de musique classique | 7 | 7 | 9 | 9 | 14 | 16 | 16 |
opéra | 3 | 2 | 3 | 3 | non significatifs:2 | ||
1 pourcentage de pratiquants ayant fréquenté 5 fois ou plus l'activité dans l'année. | |||||||
2 en 1997 la fréquentation des rave parties est comptabilisée dans une rubrique distincte. |
Source: Ministère de la Culture, 73-81-88-97
Sur la même période, les sorties populaires les plus pratiquées (fête foraine et cinéma) connaissent une évolution proche 240 .
Au moins pendant les années 80, le discours sur le repli vers la sphère privée est fondé, de même que nos doutes -et ceux d'Olivier Donnat- quant à une explosion de la pratique culturelle: les français sont plutôt moins assidus dans l'ensemble des pratiques de masse, alors que les enquêtes montrent par ailleurs que les pratiques personnelles progressent lentement. Dans notre cas, il est probable que grâce à la hausse des revenus et la baisse du prix des prestations musicales (petites disco-mobiles) les fêtes privées et familiales sont bien plus importantes qu'auparavant.
1973 | 1981 | 1988 | |
Taux pratique | 25% | 28% | 28% |
Nombre de bals | 8,5 | 5,9 | 5 |
En 1988 | |||
N'y vont jamais | fréquence: 1 ou 2 | fréquence: 3 ou 4 | fréquence: 5 et + |
25% | 53% | 21% | 26% |
(1) Part de la population de plus de quinze ans ayant participé à au moins un bal dans l'année précédente | |||
(2) Nombre moyen de bals fréquentés par les pratiquants dans l'année précédant l'enquête. |
Sources: Ministère de la Culture (81, 88)
DONNAT, Olivier et COGNEAU, Denis. Op. cit.
L’enquête du Ministère de la Culture de 1997 n’évalue plus ce critère dans le cas du bal public.
Ministère de la culture. Enquête 94. Op. cit. Mais les modes de mesure, comme les populations concernées, ne correspondent pas exactement; de plus la pratique des rave parties n’est pas prise en compte bien que ses adeptes soient en général des pratiquants très assidus.
DONNAT, Olivier et COGNEAU, Denis. Op. cit.
On assiste surtout à un mouvement d’exurbanisation avec, pour le cinéma, les nouveaux complexes multi-salles de périphéries urbaines. Les forains sont aussi concernés, ce qui les inquiète (Le Monde, 21 juin 98, p.9; P. Kremer) tandis que leur public évolue comme celui du bal: hausse de la pratique moyenne, recul sensible des habitués.