2-4-3 Droite et gauche

On insiste sur le caractère politique du bal. On peut donc se demander si une des partitions traditionnelles du pays, l’opposition droite-gauche ne peut donner quelques indices explicatifs supplémentaires. Bien que proclamée révolue, celle-ci persiste et resurgit lors de scrutins importants 586 (cartes 44). Elle permet de voir apparaître une carte qui ne recoupe pas celle de l’intensité du bal. On peut donc douter d’une corrélation nette à l’échelle nationale.

On retrouve, certes grossièrement, au premier regard les grands ensembles mis en valeur dans cette étude, mais, au delà de cette découpe proche, pas de corrélation évidente: ils sont souvent fragmentés en sous-ensembles politiquement très contrastés. Ainsi, la zone de pratique importante du bal public du Sud-Ouest et du Massif Central.

On peut seulement remarquer que les repas dansants ruraux sont nombreux dans des départements où la droite bénéficie de majorités confortables: Aveyron, Orne et bocage normand, plateaux du nord-est voire Pyrénées Atlantiques. Mais la réciproque n’est pas valable, surtout, c’est logique, dans les départements assez urbanisés. Ailleurs les exceptions ne sont pas rares (Gers et Lot-et-Garonne).

Carte 44. Droite-gauche: le maintien des traditions politiques françaises
Carte 44. Droite-gauche: le maintien des traditions politiques françaises

Cependant, dans les cas du Béarn, de la Vendée ou de la Sarthe, probablement caractéristiques de beaucoup d’autres départements français, les liens entre certaines formes et dates du bal, et les options politiques majoritaires de la population sont évidents. Il est donc préférable d’envisager une réponse positive mais prudente et nuancée. Le bal est bien politique mais le débat prend des formes différentes selon les niveaux d’échelles et les lieux de vie envisagés.

Le débat droite-gauche reste pertinent dans les régions les moins urbanisées où dominent les formes “républicaines” du bal: repas dansants ruraux et bals publics. L’opposition plus ou moins vive n’intervient pas tant dans l’intensité de la pratique (la Vendée et le Béarn sont très différents) mais plutôt sur des nuances d’intérêt local: dates, choix d’une forme de bal plutôt qu’une autre que le village voisin, dans le camp politique adverse, aura choisi. Le débat droite-gauche reste local, au plus large départemental.

En même temps, ce caractère politique semble suspendu à l’évolution du peuplement et ses formes: à l’exception de l’Alsace, les régions les plus denses ont d’autres préoccupations; elles pratiquent moins le bal. Surtout, le débat politique y prend d’autres formes: c’est le modèle “républicain” du bal, quelques soient ses nuances, droite ou gauche, qui s’oppose à un autre modèle en gestation.

Si on a vu le rôle limité des oppositions politiques traditionnelles, les pratiques religieuses, souvent liées, se révèlent moins pertinentes.

Notes
586.

ORMIERES, Jean-Louis. Op. cit.