3-2-2 Ne pas exagérer la ruralité du bal

Le principal critère explicatif semble donc bien tenir au type d’agglomération: les ruraux dansent plus, les citadins moins. C’est peut-être un peu court: une étude attentive montre qu’il est préférable de nuancer un avis aussi tranché.

Certes si on s’intéresse à la synthèse des données disponibles -elles sont nombreuses- (graphique 18; tableau 13), on voit que les ruraux ont tendance à être ceux qui préfèrent le bal; on les retrouve au maximum de tous les indicateurs, qu’il s’agisse de la pratique simple, de la pratique fréquente (3 ou 4 fois dans l’année) comme assidue (au moins 5 fois dans l’année), des dépenses.

Graphique 18. L’intensité de la pratique du bal selon le type de commune
Graphique 18. L’intensité de la pratique du bal selon le type de commune
Tableau 13. Les pratiques du bal selon les types de communes
  Pratique Pratique fréquente Pratique assidue Part dans public Part dans population Dépense Part des sorties
Note 1 2 2   3 4 4
Légende graphique 18 1 2 3 4 Non rep. 5 6
Commune rurale 40 22 33 32,3 26,8 184 50
U.U. de moins de 20 000 hbts 35 22 25 14,7 16 129 31,5
U.U. de 20 000 à 100 000 hbts 25 19 25 13,6 13,4 146 36
U.U. plus de 100 000 hbts 25 22 24 25,9 27,8 175 31
Paris 20 10 0 3 4 163 14
Reste agglo. parisienne 23 15 19 10,5 12,1 151 21
FRANCE 30 21 26 100 100 162 31
Unités; sources % 97 % 88 % 88 % 81 % 88 % 85 % 85
Note s: 1- Pratique au moins une fois dans l’année
2- Part des pratiquants
3- Répartition retenue comme base de l’enquête
4- Voir graphique 2

Sources: Ministère de la culture 81, 88; 97 INSEE, 85

On constate que les communes rurales et, à moindre niveau, les communes incluses dans de petites unités urbaines sont seules à disposer d'une pratique supérieure à la moyenne, qui s'accroit nettement d'ailleurs de 1981 616 à 1997. On a vu aussi que les agriculteurs (graphiques 5 et 9) sont également les mieux représentés dans ce public et ceux dont la fréquence est la plus importante; ils vont, comme les ouvriers et les retraités de plus en plus souvent au bal. Ces catégories sont, on le sait, surreprésentées dans les campagnes. Mais c’est chez les jeunes qu’on a les plus fortes variations 617 entre les ruraux dont 44% des 12-15 ans fréquentent le bal, les autres agglomérations (un peu plus plus de 25%) et l’agglomération parisienne (13%).

L'enquête suisse 618 confirme nettement cette idée: les agriculteurs ont une pratique double de la moyenne mais introduit un bémol: les citadins sont sensiblement aussi nombreux que les ruraux à fréquenter les fêtes de village.

Si le caractère rural du bal semble donc indéniable, si les régions de forte pratique correspondent grossièrement à la "diagonale du vide", des réserves doivent être émises qui vont dans le même sens.

En effet, dans le tableau 13, les ruraux sont le seul groupe nettement plus important dans le public des bals que dans la population française à l’époque de l’enquête. Mais c’est aussi là qu’il importe de nuancer: ils n’en représentent qu’un tiers. La faiblesse de leurs effectifs dans la population française limite logiquement leurs effectifs. Comme en Suisse, la plupart des participants aux bals sont des urbains. C’est encore plus nettement le cas en Belgique 619 . Cette remarque est renforcée par le fait que l’urbanisation française s’est accrue depuis 1982 et que bon nombre de village, classés alors ruraux, sont aujourd’hui considérés comme urbains, tant du fait de l’évolution globale des modes de vie que de leur appréhension statistique 620 .

Lorsque l’INSEE s’intéresse à la pratique de la danse, on distingue avec plus de précision l’origine du public 621 : on est surpris de constater que les résultats sont encore plus homogènes que ceux proposés par le Ministère de la Culture. Le graphique 19 amène à parler d’une relative homogénéité de la pratique, même à Paris et dans sa banlieue. La ruralité se révèle donc intéressante pour expliquer en partie les formes de cette pratique mais moins pertinente pour son intensité.

Pourquoi donc alors une image de ruralité si forte s’attache-t-elle au bal ? Trois types d’explications permettent d’y répondre.

Graphique 19. La pratique de la danse selon la commune de résidence du ménage
Graphique 19. La pratique de la danse selon la commune de résidence du ménage
Notes
616.

Ministère de la culture, Enquête 1981. Op. cit.

617.

Ministère de la culture. Enquête 94. Op. cit.

618.

LALIVE D’EPINAY, C. Temps libre. Op. cit.

619.

BOUILLIN, DARTEVELLE. Op. cit.

620.

MARCONIS, R. Op. cit.

621.

COLLECTIF. Les pratiques de loisir; enquête 1987-88. INSEE Résultats, n° 3, 1/89, tableaux 54A à 54F, pp. 134-135.