Il s'agit d'un troisième texte de valorisation du travail de recherche entrepris au CEP de Paris X. Il poursuit la réflexion précédemment engagée et présente synthétiquement les résultats obtenus. Il réaffirme le principe fort selon lequel "la qualité (en formation) dépend largement de la qualification des acteurs (et qu')on ne peut tendre à l'amélioration des processus (et des produits) qu'en augmentant la compétence collective". Cette démarche eut pour effet de gagner en cohérence interne, d'engager le CEP à renforcer ses liens avec le monde de l'entreprise et de le re-situer dans l'Université.
Nous écrivions déjà en janvier 1993, lorsque nous avons engagé notre réflexion sur la qualité de la formation au centre d'éducation permanente de l'université Paris X que "débattre de la qualité de la formation en se référant à la qualité telle que la définit le monde industriel" et la considérer "comme un produit, certes spécifique, régi par la loi du marché (...) avait de quoi ébranler plus d'une certitude, ébranler plus d'une croyance, "décoiffer" plus d'un universitaire"262. Depuis cette époque, les conceptions, dans ce milieu, ont largement évolué et la qualité, sans toutefois se départir de l'esprit critique nécessaire, y est un discours, si ce n'est toujours partagé, du moins accepté.
En effet, de nombreux services communs de formation continue des universités ont engagé une réflexion263, voire des actions, dans ce domaine et partagent peu ou prou la définition proposée par la norme X.50.120 de l'AFNOR selon laquelle la qualité est "l'aptitude d'un produit ou d'un service à satisfaire les besoins (exprimés ou potentiels) des utilisateurs". Définition, à quelques nuances près, identique à celle de la norme ISO 8042 qui considère que "la qualité est l'ensemble des propriétés et des caractéristiques d'un produit ou d'un service qui lui confère l'aptitude à satisfaire des besoins exprimés ou implicites"264.
Sans revenir sur les notions de besoin et de client, largement débattues dans la littérature touchant à la formation des adultes et qui nécessiteraient de longs développements, soulignons néanmoins qu'on ne saurait accepter que la satisfaction des besoins du "client" en matière de formation soit la satisfaction des besoins immédiats et limités à une vague expression ou à un quelconque ressenti. Les besoins à chaud comme les évaluations de satisfaction nécessitent, nous le savons, des investigations plus poussées et un vrai travail, pour les besoins d'analyse de la commande.
En effet, pour les universitaires en règle générale et au CEP en particulier, cette notion de satisfaction dépasse très largement l'immédiateté, mais vise aussi à satisfaire les "besoins théoriques non exprimés sur lesquels s'ancrent les apprentissages (et) qui favorisent, à terme, les transférabilités et la continuation du processus intellectuel"265.
Ainsi, l'équipe du CEP, si elle s'inscrit dans une réflexion et une action qui se proposent d'améliorer la qualité des formations mises en oeuvre, se refuse à partager une définition étriquée et fonctionnaliste de la qualité et demeure vigilante afin d'éviter que la qualité totale ne devienne pas totalitaire, pour ne pas dire "qualitotalitaire".
Ces quelques remarques liminaires faites, nous rappellerons dans une première partie les principes sur lesquels le CEP entend baser sa démarche-qualité, puis dans une deuxième, après un bref rappel méthodologique, nous évoquerons les résultats d'une étude menée au CEP266 afin de mettre en place une démarche-qualité concertée tenant compte de la mise en garde de G. Duval pour lequel : "Derrière le jargon des "qualiticiens" et des instances de normalisation, ce n'est rien de moins que l'extension de la logique taylorienne aux ingénieurs et techniciens qui est en jeu "permettant de substituer les personnels (les uns aux autres et de) diminuer le pouvoir qu'apporte la qualification"267. Puis, dans un dernier moment, nous tenterons quelques réflexions sur la qualité en formation, très largement issues de notre travail de terrain.
Ce texte a paru dans Flash formation continue, n° 425, 15 mai 1996, pp. 9-16.
Lenoir H., la Formation continue à l'Université face au défi qualité, Journal de la formation continue et de l'EAO, n° 269, 1993..
Un colloque sur ce thème s'est tenu en 1995 à l'initiative de l'université de Bourgogne.
Pour apprécier la qualité en formation, Bercowitz A., Fievet P., Poirier D., Paris, L'Harmattan, 1994.
Lenoir H., op. cit.
Lenoir H., Silvera R. en collaboration avec Botter F., Muller C. et Sellem-Bidji R., Pour une démarche qualité au CEP, rapport d'étude, mai 1995.
Duval G., Taylor rattrape les cols blancs, Alternatives économiques, janv. 1993.