Réflexion sur les effets du multimédia sur l'ingénierie
de formation
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Cette contribution vise à mieux cerner "les apports et les contraintes qui résultent de la mise en oeuvre des nouvelles technologies éducatives" dans le champ de l'ingénierie de formation, leurs implications pédagogiques comme leurs conséquences économiques. Elle souligne, et ce quel que soit l'intérêt de ces technologies, qu'il est essentiel de "se demander à qui profite le multimédia, en quoi (...) facilitera-t-il l'appropriation des savoirs et leurs transferts". Elle interroge enfin sur le caractère de réelle nouveauté de ces technologies et leurs hypothétiques effets radicaux en pédagogie tout en observant qu'en la matière "nous n'en sommes qu'aux balbutiements". Au-delà, selon l'utilisation et la gestion qui en seront faites, ces technologies au service de l'éducation favoriseront des cohérences ou renforceront des oppositions.

Aux dires des spécialistes415, nous assistons "au décollage du marché du multimédia grand public avec 800 titres disponibles et 700 000 CD vendus en France. Si l'éducatif ne représente que 13 % de ces ventes, les centres de ressources multimédias se multiplient au sein des organismes et des entreprises et ces outils commencent à faire partie de l'activité quotidienne des formateurs et des publics".

Forte de ce constat, cette contribution vise à prolonger une réflexion, déjà engagée dans le champ de la formation, sur les effets du multimédia sur l'ingénierie ou plutôt les ingénieries de la formation.

Nous tenterons donc de mieux cerner les apports ou les contraintes qui résultent de la mise en oeuvre des technologies éducatives contemporaines sur l'ingénierie des "3P", à savoir :

D'une part, afin de ne pas alourdir, notre propos, nous laisserons de côté l'ingénierie transversale (ou ingénierie de gestion) qui vise à la mise au point de tous les outils et de toutes les procédures de gestion que nécessite un dispositif complexe pour fonctionner.

D'autre part, nous entendons par ingénierie de formation, quel que soit le niveau des effets repérés, l'ensemble des pratiques raisonnées de conception, de construction, de conduite416 et d'évaluation organisant un processus rationnel, concourant au fonctionnement d'un système complexe et visant à atteindre un ou plusieurs objectifs de formation.

En effet, nous essaierons, dans ce texte, de repérer les modifications sur le système de formation que produit le recours à ce qu'il est convenu d'appeler le multimédia417, c'est-à-dire l'utilisation conjointe de supports ou de ressources pédagogiques variés requérant l'emploi de nouvelles technologies permettant la transmission de l'information, de textes, d'images et de sons...

Nous nous intéresserons plus particulièrement ici aux effets du multimédia dans les formations de proximité, ou formations présentielles, sans toutefois totalement ignorer les effets de l'utilisation des multimédias dans les dispositifs de formation non présentiels et à distance.

Notre propos se centrera donc plus particulièrement sur les effets produits par le choix d'utilisation d'un centre ressources multimédia dans un dispositif de formation. Il se fonde, mais pas exclusivement, sur l'expérience en cours, menée dans le cadre d'un dispositif expérimental de lutte contre l'illettrisme, conduit à la communauté urbaine de Strasbourg.

Notes
414.

Ce texte a paru in Actualité de la formation permanente, n° 138, septembre-octobre 1995, pp. 6-10.

415.

Cf. Lettre de P. Chevalier, directeur de l'ORAVEP, du 22 mai 1995.

416.

Les opérations de conduite sont constituées d'activités de suivi et de gestion du dispositif.

417.

Toutes ces remarques sont issues d'observations non outillées ou le résultat de discussions informelles. Il conviendrait sur bien des points d'engager un travail systématique de recherche sur les effets du multimédia en matière d'ingénierie de formation.