Effet et enjeux pour les collectivités

Cette formation expérimentale renforce qualitativement le potentiel transport des collectivités territoriales. Elle a permis aux stagiaires de se situer géographiquement sur la carte des enjeux du secteur, de se positionner dans l'univers des transports et du déplacement urbain et interurbain. Elle les a outillés intellectuellement et méthodologiquement afin qu'ils puissent repérer les lignes de forces et les stratégies politiques et financières qui irriguent et traversent le transport. Forts de ces compétences nouvelles, les élus ont vu s'accroître les capacités d'intervention de la collectivité dans un domaine où les évolutions considérables en gestation nécessiteront à l'avenir une meilleure gestion, un meilleur contrôle des réseaux. En effet, ce secteur d'activité mobilisera de plus en plus de masses financières et deviendra l'un des lieux de décisions quant à la survie ou non des centres-villes.

L'effet de la formation dépasse donc le stagiaire, son étude vise à mesurer en quoi la professionnalisation s'accroît et est mise en oeuvre, mais elle essaie aussi de repérer les effets dans l'environnement. Elle amène à considérer la formation comme un épiphénomène transformant les compétences des sujets qui, une fois en action, modifient les réalités, participent à l'évolution des systèmes. La mesure des effets permet donc d'avoir une vision à la fois exhaustive, plus qualitative et plus large d'une action de formation. Elle favorise un regard plus systémique sur le réel, prenant en considération que la modification d'un élément ou d'un sujet peut entraîner des modifications dans le système ou le sous-système. Elle permet sans doute de concevoir et de comprendre l'acte de formation comme s'inscrivant dans une série d'éléments complexes, mais cohérents. Elle favorisera sans doute un regard plus global, moins pédagogique, sur l'activité de formation tout en s'intéressant à la qualité de la prestation, tant pour l'individu que pour le collectif, sans soumettre les intérêts de l'un aux intérêts de l'autre.

Nous déclarions que cette étude n'avait pas pour objet d’évaluer le dispositif de formation, elle a néanmoins entraîné une réflexion importante sur le dispositif lui-même, une espèce d'effet "boomerang"... L'effet d’employabilité, par exemple, a nourri une réflexion sur l'ouverture de la formation à des stagiaires du secteur privé. Il a permis d'engager une réflexion sur la validation et la reconnaissance interne de la qualification, de la professionnalisation (classification) et sur la certification interne/externe de la formation, donc sur le niveau de pré-requis des stagiaires (grades, expériences, formation, fonction). L'effet sur les compétences a poussé à s'interroger sur la nécessité d'une filière professionnelle "transport" dans la fonction territoriale, la création d'un "corps" spécifique de spécialistes dont le dispositif pourrait être le creuset, le noeud. L'effet de réseau, quant à lui, a permis de souligner l'importance de la capitalisation des informations, la nécessité d'un décloisonnement, l'ouverture indispensable des collectivités territoriales à leurs partenaires extérieurs. Il pourrait devenir l'un des objectifs explicites du dispositif. L'objet de la mesure des effets s'élargit, des effets directs sur les individus aux effets indirects sur les structures et/ou les systèmes. Aux effets induits sur le dispositif, le champ de la mesure ne cesse de s'enrichir.

Notre investigation était limitée dans le temps et déterminée par lui. Ses prétentions étaient modestes. Elle nous a permis non seulement, et c'était son but, de constater une professionnalisation réelle, même si elle reste partielle, des stagiaires, mais aussi de mieux appréhender les effets possibles d'un tel dispositif de formation dans les collectivités territoriales. Au-delà, elle nous a ouvert des horizons en nous permettant d'entrevoir des perspectives de développement à expérimenter peut-être dans d'autres secteurs d'activités. Nous dirons avec Richard Walter : "La mesure des effets de la formation n'a de sens que si elle aboutit à une procédure clairement établie d'interprétation des résultats et à des décisions de réorientation ou de réinvestissement de la formation en fonction des manques, défauts ou écarts d'efficacité constatés."443

Notes
443.

Richard W., Evaluer l'investissement formation ?, Formation et Développement, ADEP,
n° 31-82, 1988.