Politique de formation et métier de formateur 529

Cet article est l'aboutissement d'un travail et d'une observation visant à mieux appréhender l'organisation du secteur de la formation des adultes. Il propose une grille d'analyse de ses évolutions autour de trois indicateurs et s'articule autour de trois périodes durant lesquelles se structure la profession des formateurs. Ces trois indicateurs sont à considérer comme des révélateurs de rupture ou de suture. Ils sont des outils privilégiés, des clés de lecture et de compréhension des contradictions et des fusions qui sont à l'oeuvre dans l'activité de formation depuis plusieurs décennies. Par ailleurs, cette contribution essaie d'ouvrir quelques perspectives et formule l'hypothèse d'une évolution significative de l'activité, si viennent à se développer l'usage des nouvelles technologies éducatives et la construction d'organisations qualifiantes530 évoquées antérieurement. Enfin, il réaffirme "le lien étroit qui unit métier de formateur et politique de formation", trop souvent oublié et qui laisse accroire que la formation est une fonction autonome et souveraine.

Nous tenterons ici, sans vouloir toujours être exhaustif et en empruntant des raccourcis toujours discutables, de repérer, chronologiquement, l'émergence de faits ayant entraîné, dans les métiers de la formation, la constitution de nouvelles réponses, tant pédagogiques que politiques ou organisationnelles.

Nous construirons notre propos autour de trois grandes étapes et sur une série de trois facteurs qui, selon nous, apparaissent comme des facteurs déterminants dans l'apparition de nouvelles pratiques donc, à terme, dans la constitution des nouvelles compétences et des nouveaux savoirs des formateurs.

Le premier est un facteur juridique, institutionnel ou organisationnel. En effet, nous constatons que les modifications faites au Livre IX du Code du travail favorisent ou imposent aux métiers et aux politiques de la formation des évolutions constantes. Le CFI (crédit de formation individualisée) et le droit au bilan de compétences en sont des exemples récents. Il en va de même, dans le cadre de la démarche qualité en formation, avec l'utilisation des normes AFNOR ou ISO.

Le deuxième est un facteur socio-économique. Les modifications de la situation économique, la crise et la recherche d'une plus grande efficacité de la formation, ont fait naître les notions d'investissement, de co-investissement et de retour d'investissement-formation. Autant de concepts qui ont donné lieu à l'apparition de nouveaux savoirs d'une part, et de nouvelles pratiques d'autre part chez les formateurs. La recherche, aujourd'hui, d'organisation qualifiante et/ou formative en est une bonne illustration. L'évolution des mentalités, quant à elle, a permis l'apparition de pratiques de formation plus participatives et davantage centrées sur l'apprenant. De même les évolutions dans les conceptions du management et de l'organisation des entreprises ont entraîné des manières de faire différentes.

Le troisième facteur intègre les données technologiques et scientifiques qui permettent, et président à l'apparition de compétences et de savoirs nouveaux. Les technologies modernes de l'information, appliquées à la formation, ont permis des évolutions majeures dans la conception et les pratiques des formateurs. Les EAO (enseignements assistés par ordinateur), les centres-ressources et les formations ouvertes en font la démonstration chaque jour. Les avancées de la psychologie cognitive le prouveront, on peut le penser, encore davantage demain.

Nous allons donc tenter, à l'aide de ces trois facteurs, de repérer les grandes compétences mobilisées par les métiers de la formation dans les années 70, puis dans les années 80, en soulignant plus particulièrement celles apparues dans le début des années 90.

Pour terminer, dans une visée prospective, nous dégagerons quelques tendances et nous formulerons quelques hypothèses sur les compétences et les savoirs encore à naître.

Notes
529.

Ce texte a paru in Flash formation continue, n° 398, 1er février 1995, pp. 12-16.

530.

Voir supra.