Comment définir cette démarche clinique?

L'approche clinique désigne ‘ "un espace où une pratique trouve à se théoriser en partant d'une situation singulière et de l'implication de celui qui y est compris comme professionnel. Son outil classique est les études de cas; elle fait de l'implication son mode de connaissance." ’ (CIFALI, 1994, p. 286). Tout ce qui a été analysé dans cette recherche, a été confronté à l'expérience d'autres praticiens, et a été éprouvé à l'épreuve de la clinique. Notre propre position de rééducateur nous comprend dans cette analyse, et en fait une réflexion impliquée.

Cette implication, Mireille CIFALI (1994), la qualifie de "position psychanalytique". Quelles en sont les conditions? ‘ "Je qualifie de psychanalytique cette position qui permet aux praticiens, sans céder sur la complexité de leurs actes, de construire un savoir de l'intérieur..." ’ (p. 10) ‘ "...Construction d'un savoir au creux même de la subjectivité et de l'imaginaire...Un praticien qui tente de construire un savoir à partir de sa pratique quotidienne travaille sur un objet dans lequel il est impliqué. Il ne peut en être autrement.." ’ (p. 290).

Une expérience de vingt-huit années, nous a fait connaître "de l'intérieur", la "réalité" rééducative issue des deux textes de 1970 et de 1990, et donc vivre une profonde mutation de la pratique rééducative, et la recherche de définition de son identité professionnelle, par le rééducateur. Ces transformations n'ont pas été simples à effectuer pour les praticiens qui, comme nous, étaient issus d'une "ancienne formation" et d'un premier "modèle" de la rééducation, celui des textes de 1970. La tâche a été rude, l'investissement personnel a été indispensable et considérable. Cependant, plus peut-être que pour "les jeunes" qui arrivent directement "au moule" d'une formation complètement repensée en fonction des textes de 1990, les "anciens", comme nous-même, avons pu vivre les contradictions, les tensions qui les accompagnaient, et, en contrepartie, la richesse de cette transformation.

L'exercice au sein de la plupart des structures institutionnelles que peut rencontrer un rééducateur: dix années en Groupe d'Aide psychopédagogique (GAPP), puis cinq années en Réseau d'Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté (RASED) en passant par cinq années en Centre Médico Psycho Pédagogique (CMPP), nous a demandé et permis d'avoir plusieurs points de vue sur la rééducation, mais aussi d'acquérir une connaissance sur les structures dans lesquelles peut exercer le rééducateur. Il faut ajouter à cela quatre années en classe d'adaptation primaire, qui furent riches d'expérience grâce à ces enfants, à ce qu'ils nous ont appris, riches de réflexion et d'interrogations. Même si nous avons choisi de ne pas reprendre dans cette étude présente des éléments de cette expérience, elle nous constitue aussi, et participe à ce que nous sommes aujourd'hui. Quatre années passées en tant que formatrice d'éducateurs spécialisés, "en écart" de la rééducation, nous ont fait connaître d'autres systèmes de pensée, d'autres conceptions, d'autres références, et toucher du doigt "un autre monde", celui de "l'extérieur de l'école", "hors des limites" de celle-ci, et pourtant intérieur à l'éducation. Une formation d'enseignants, actuelle, au sein de la MAFPEN, parallèle à la fonction de rééducatrice, nous conduit à changer systématiquement de point de vue et à envisager celui du professeur, confronté à l'enfant et à l'adolescent en difficulté scolaire.

Claude REVAULT D'ALLONNES (1989, p. 21), donne, comme caractéristiques d'une démarche clinique:

  • le lien à la pratique,
  • le rôle de la demande,
  • l'importance de la relation,
  • la prise en compte de l'implication,
  • les rapports avec la psychanalyse,
‘- la réévaluation du social, qui implique "une multiréférentialisation, une interdisciplinarité. Sur le plan pratique, elle conduit à utiliser divers outils en les englobant dans une perspective qui déborde leur cadre initial." (PLAZA, 1989, In REVAULT D'ALLONNES et al., p. 15).’

La rééducation a été créée, par l'institution scolaire. On peut faire l'hypothèse, que nous nous proposons de vérifier, (hypothèse de recherche 1), que c'est en réponse à un besoin. Il y a donc eu demande d'une nouvelle structure, au sein de l'école, qui répondrait à des besoins auxquels l'existant ne pouvait satisfaire. Dans un deuxième temps, la rééducation étant devenue une réalité, elle ne peut s'instituer, avec chaque enfant, que s'il y a demande d'une aide spécifique pour cet enfant, au sein même de l'école.

Selon les objets analysés, et à des titres divers, nous pourrons constater la présence de ces dimensions, dans notre recherche. Nous serons attentive à les repérer. Produit d'un métissage, cette démarche, selon le même auteur, ‘ "cherche des points de contact entre le sociologique et le psychologique, la subjectivité et l'altérité, l'affect et la représentation, le pulsionnel et le symbolique, l'intériorité et l'institution..."(p. 15).

Dans la mesure où nous ferons appel à la théorie psychanalytique pour éclairer nos analyses, en interrogeant, par exemple, les processus d'identification, de projection, d'exclusion, de construction de l'identité professionnelle, une question s'impose: