4-6- Problèmes posés: Norme (s), normalité et “a-normalité”; adaptation, inadaptation...

La question de "la normalité" et de "l'anormalité " est ainsi posée pour la première fois au sein de l'institution scolaire, vis à vis d'enfants non atteints dans leur intégrité physique de manière visible, mais qui "résistent" à la scolarité obligatoire.

Mais de quelles normes parle-t-on, et qui les définit? Y a-t-il UNE norme, celle que définit l'école, entraînant déviance, inadaptation de celui qui ne s’y conforme pas exactement? Tout système définit ses limites, définit par là même un extérieur et un intérieur, un dedans et un dehors. A partir des lois de Jules FERRY, cette question se pose au sein même de l'école. Comment celle-ci va-t-elle définir ses propres normes, ses limites? L'école a commencé à exclure certains élèves de son centre, comment va-t-elle définir les critères de cette expulsion? Les limites du système seront elles étanches ou bien perméables? Elastiques, ou bien rigides? Comment va-t-elle assumer ce mécanisme d'expulsion qui est enclenché? Comment va-t-elle gérer le problème de ceux qui seront "hors-normes", donc inadaptés? Y a-t-il place, au sein de l'école, pour la différence, une différence articulée, acceptée et intégrée, une différence qui ne provoque pas immédiatement des processus d'exclusion vis à vis de celui qui n'est pas "conforme" aux attentes? Ou bien, trouve-t-on, dans la perpétuation d'un modèle imaginaire unique et universel, tous les processus d'identifications basés sur "le semblable", les mécanismes de projection, de rejet et d'exclusion, qui en sont l'autre face?

Ce sont toutes ces questions, délicates, difficiles, qui s'amorcent ici, et auxquelles l'école va se trouver confrontée. Un mouvement "d'exclusion interne", c'est-à-dire un mouvement d'expulsion du centre vers la périphérie mais encore à l'intérieur du système, est enclenché. La pédagogie va interpeller les tests pour mieux comprendre ce qui se passe dans l'échec scolaire d'enfants de plus en plus nombreux à le vivre. On peut dire que "l'ère psychométrique" est née.

Qu'est-ce qu'un test? Nous retenons la définition, devenue “classique”, qu'en donnera René ZAZZO: ‘ "Un test est une épreuve strictement définie dans ses conditions d'application et dans son mode de notation et qui permet de situer un sujet par rapport à une population elle-même sociologiquement et biologiquement définie."

Dans une politique de généralisation de la méthode des tests, que mesure-t-on? Tout ou presque, pourra faire l'objet d'une mesure par un test. On mesure l'intelligence, mais aussi les performances ou aptitudes spécifiques de l’individu, diverses capacités psychologiques et motrices bien définies à l'avance lors de la construction de l'épreuve: la discrimination visuelle, l'organisation spatiale, la latéralité, le niveau de langage, la mémorisation et les troubles de mémoire, l'apprentissage et la conceptualisation de rapports logiques, la fatigabilité, l'application au travail, le rendement,...On leur adjoint quelquefois des tests projectifs ou de personnalité...On entre dans "l'ère psychométrique". Pédagogues et psychologues semblent pris dans une frénésie de mesures, dans une préoccupation scientifique, d’opérationnalisation et de quantification, démarche qui s’étaye sur des références biologiques. L'approche psychométrique des élèves génère sélection et exclusion.