1- Des propositions nouvelles pour connaître l'enfant, et pour l'aider dans sa difficulté scolaire.

Les classes de perfectionnement ont été peu nombreuses jusqu'en 1945. Elles se sont multipliées depuis. Il s'avère qu'avoir "éliminé" des classes, le terme est péjoratif et utilisé sciemment, un certain nombre d'enfants, les avoir scolarisés dans des classes de perfectionnement, ne résout pas tous les problèmes de l'échec scolaire, puisque des enfants qui n'en relèvent pas, leur QI étant normal ou quasiment normal, sont pourtant en échec.

Il y a tous ces enfants dont l'intelligence est mesurée comme approchant la normale, la limite. Il y a aussi, ce qui rend tout le monde perplexe, des enfants dont l'intelligence s'avère aux tests comme tout à fait normale, voire au-dessus de la normale, et qui sont en complet échec scolaire, ou, comme il est dit, "en échec scolaire sélectif", c'est-à-dire que leur échec se limite à une, deux disciplines: la lecture, par exemple, ou les maths, ou encore l'orthographe...Alors?

Depuis l'éclairage apporté par la psychologie scientifique, sur les difficultés de l'enfant, l'explication de tous les échecs et retards par la seule paresse de cet enfant, ou par son manque de dons, ne peut plus être soutenue. On avait postulé, toujours dans ce présupposé universaliste que nous avons souligné, que si l'enfant n'est pas "paresseux", s'il remplit les conditions de capacités intellectuelles requises, il devrait apprendre comme les autres, suivre le cursus proposé par les programmes. ...Alors?

A présent, on avance que ces enfants en échec, ne sont pas pour autant, tous "débiles"...Alors, on va chercher désespérément d'autres causes, d'autres explications, dans une quête effrénée de diagnostics armés de tests, afin d'envisager des remèdes de plus en plus spécialisés. Tout un espace incertain, rempli de contradictions et porteur de rancoeurs, voire d'angoisses, va prendre forme. Une lutte de territoires, subtile, faisant intervenir des enjeux complexes, souvent ambigus, va ainsi s'ouvrir entre la science médicale qui nourrit des prétentions pédagogiques, et ce qui voudrait être ou devenir une science pédagogique, ou la pédagogie "tout court". La première se targue de bases biologico-scientifiques, désirant parfois édicter les principes d'une "bonne éducation" ou d'une "bonne pédagogie". La seconde défend son territoire de l'intrusion des spécialistes, lâchant pourtant parfois de larges pans de ce territoire, et ce, justement, en ce qui concerne les enfants qui ne répondent pas à ses attentes, tentant de reprendre ce qu'elle avait cédé la veille, empruntant les conceptions médicales de la difficulté, et ses méthodes de remédiation...Les luttes institutionnelles autour du Centre Psycho-pédagogique Claude Bernard, en plusieurs périodes, à partir de 1945, en donnent une illustration très significative, qui est loin d'être unique.

Les Sciences humaines connaissent un essor considérable et proposeront de nouvelles réponses à la difficulté de l'enfant, ainsi que des repères pour la transformation du modèle de l'école, tel que l'avait conçu la Troisième République.