1-2- "Premiers pas", et premiers questionnements.

1-2-1- Un flou institutionnel et "une obligation de créativité".

Les textes définissaient un cadre à l'action rééducative: des intervenants, des objectifs et le contexte: l'école. Le vide institutionnel concernant les pratiques elles-mêmes, les stratégies à mettre en oeuvre dans l'aide rééducative, que celle-ci s'adresse à une classe, à un petit groupe d'enfants, ou encore à un enfant en relation individuelle, l'absence de "doctrine rééducative" précise, laissait un flou propice aux innovations, mais nécessitait pour le praticien de créer, de construire peu à peu sa propre pratique et son identité professionnelle. Poussés par les uns, tirés par les autres, et en particulier par eux-mêmes, ils étaient convoqués à se définir. Se présenter et trouver des mots pour expliquer exactement ce qu'ils faisaient, était un exercice difficile. Comment y parvenir, lorsqu'on est en pleine recherche, et que les idées ne sont pas claires pour soi-même?

Pendant quelques années, et en l'absence de définition officielle administrative stabilisée, le rééducateur ne parvenait à se définir que par la négative: "ni pédagogue, ni thérapeute...". Il était nécessaire et urgent de trouver enfin des définitions positives concernant cette "troisième voie", entre pédagogie et thérapie, telle que la définissait Jacques LEVINE par exemple, dans laquelle ils sentaient bien qu'ils devaient s'inscrire 107 . D'où la grande difficulté, pour les premiers rééducateurs sans expérience et sans prédécesseurs, sans "maîtres", de se définir.

Notes
107.

Jacques LEVINE (1993-1), propose une schématisation très parlante qui représente le "moi" comme une maison. Il la nomme "le MOI-MAISON". Le "moi social", domaine privilégié du conscient, du rationnel, correspondrait à la partie du moi à laquelle s'adresse la pédagogie. Le "moi de la cave", ou "moi archaïque", registre de l'inconscient, serait celui auquel s'adresse le psychanalyste, dans la thérapie. La "frontière" entre les deux, serait justement la zone concernée par la rééducation. Il avait présenté cette conceptualisation, alors qu'il tentait de définir les différents champs d'intervention auprès de l'enfant, dès 1980 (J. LEVINE et A. RAMIREZ, 1980).