Articulation des aides.

S'il est question de "construction " ou de "reconstitution des "compétences" de l'élève dans l'énoncé des objectifs du rééducateur, si son action est située prioritairement au niveau du "désir d'apprendre" et de "l'estime de soi" de l'enfant, "l'intervenant spécialisé chargé de l'aide à dominante pédagogique" a pour objectif "d'améliorer les capacités de l'élève" 192 . Il s'adressera donc à un élève qui "peut parler apprentissages", selon l'expression de Yves de La MONNERAYE (1994), c'est-à-dire avec un élève qui est encore (ou déjà) dans une dynamique d'apprentissage, fut-elle marquée de l'échec. Cet élève éprouve des difficultés à "maîtriser" ses "méthodes" ou certaines "techniques" d'apprentissage 193 .

Cela revient-il à dire que l'action du rééducateur pourrait être située "en amont" de l'aide apportée à l'enfant par le maître de la classe, et en écart de l'aide spécialisée à dominante pédagogique, apportée par l'intervenant concerné, du réseau?

Articuler les actions entre elles, définir leurs places respectives, suppose que chacune d'elles ait assuré suffisamment son identité. Si nos analyses ont pris pour objet principal, jusqu'à présent, le rééducateur dans sa quête d'identité professionnelle, nous n'oublions pas que celle-ci est inséparable de la manière dont il conçoit sa pratique. Il n'est pas de médecin sans malade, de pédagogue sans élève, de rééducateur sans "enfant rééduquant". Les différentes questions que nous nous posons, et les réponses que nous avançons, même lorsqu'elles paraissent concerner directement "le rééducateur", le sont toujours référées à sa pratique professionnelle. La raison d'être de celle-ci, est l'enfant et sa difficulté. Il n'y pas de réponse sans question préalable, même lorsque celle-ci n'est pas explicitement posée. Dans le cas présent, c'est l'enfant en difficulté à l'école qui pose les questions, qui apporte l'énigme de ses difficultés. Si la rééducation a une place, "légale", donnée par les textes officiels, quelle place va-t-elle pouvoir, et devoir prendre, dans l'école, au niveau de ses méthodes, et au niveau de l'articulation de son intervention avec celles des autres partenaires, pour pouvoir répondre, d'une manière spécifique, aux besoins de certains enfants en difficulté à l'école?. Toutes ces questions, le rééducateur se les pose. Elles lui sont posées avec insistance par les enseignants, par les partenaires extérieurs et par les autorités hiérarchiques. Elles lui sont posées également, quoique d'une manière différente, par les parents. Si la circulaire de 1990 donne une existence légale à la rééducation dans l'école, elle laisse aussi au rééducateur la responsabilité de répondre à ces questions. Il devient urgent, pour y répondre, de redéfinir avec plus de précision les identités professionnelles et les places respectives, de chacun des intervenants possibles, auprès de l'enfant. Il s'avère nécessaire de clarifier les fonctions de chacun. La manière d'appréhender et de comprendre, au sein de l'Institution Scolaire, la difficulté de l'enfant, pourrait être le nouage de cette nouvelle articulation des aides à mettre en place. Les stratégies adoptées pour écouter cette difficulté de l'enfant, celles qui conduisent à poser l'indication d'aide à lui proposer, dépendent étroitement, dans leur conception et leur mise en oeuvre, de la manière d'entendre l'énigme que l'enfant pose à l'école, par sa difficulté. D'où les questions: "Y a-t-il, dans l'école, des enfants relevant spécifiquement d'une rééducation? A quels besoins de l'enfant celle-ci devrait-elle pouvoir répondre?" Ces questions peuvent se traduire, dans un premier temps, par: Comment les rééducateurs vont-ils, à partir de 1990, entendre la difficulté d'un enfant, à l'école?. C'est à ces questions que nous nous attacherons à répondre, dans la deuxième partie de cette recherche.

Notes
192.

Circulaire n° 90-082 du 9 avril 1990.

193.

id., p. 1041, point 2-1.