Evaluer les "effets" de l'aide rééducative.

Deux tentatives d'évaluation des "effets" de la rééducation ont été menées, entre 1987 et 1990. Si, pour son enquête, Jean-Louis DUCOING avait adopté une méthodologie qui tentait d'analyser finement les effets psychologiques et relationnels de la rééducation, en interrogeant directement les partenaires éducatifs, la méthode statistique d'Alain MINGAT cherchait à éviter l'intervention du "facteur humain". Dans un paradigme scientifique, Alain MINGAT décidait de juger de l'efficacité de la rééducation sur des résultats concrets, visibles, observables, mesurables et immédiats. Les résultats obtenus, en termes d'acquisitions, de rendement et d'efficacité de l'élève, suivant un critère de non-redoublement de sa classe par exemple, devaient démontrer, ou non, l'efficacité de la rééducation.

Cette "tension évaluative" est toujours actuelle. Avec insistance, les autorités hiérarchiques demandent aux rééducateurs, de procéder à l'évaluation des effets de leur intervention. Quelle position adopter face à cette demande? C'est une question délicate, qui interroge les praticiens.

Nous nous étions donnée comme tâche, dans ce chapitre, de rechercher de quelle manière a pu s'élaborer historiquement l'identité du rééducateur. Mais comment définir son identité, quand sa place n'est pas assurée, reconnue? Lorsque l'on ne sait pas si on existera encore l'année suivante? Le "pari de la rééducation à l'école", tel que certains l'ont nommé 215 , enconsidérant "le pari" de son effet sur l'enfant, n'a-t-il pas été aussi, bien souvent, "le pari de l'existence de la rééducation à l'école"? Nous avons pu commencer à arguer la nécessité de la présence de la rééducation à l'école, en montrant le besoin ressenti par l'institution scolaire, d'une alternative à l'exclusion de l'enfant en difficulté. Cette place de la rééducation dans l'école, nous parviendrons sans doute à la définir, à la préciser, à partir de l'analyse des besoins spécifiques des enfants auxquels va pouvoir être proposée une rééducation, et, par voie de conséquence, à partir de l'analyse de la pratique rééducative. Cette analyse devrait en retour nous permettre de mieux connaître QUI est ce rééducateur.

Mais auparavant, il nous faut faire le point sur ce que nous avons appris en interrogeant les origines de la rééducation, l'émergence des idées et des pratiques rééducatives, leur évolution, et les tentatives du rééducateur pour élaborer son identité professionnelle. Avons-nous obtenu les matériaux espérés pour la suite de notre recherche?

"L'illusion est nécessaire pour entreprendre. La désillusion est nécessaire pour construire."
Claude VEIL (1995, p. 54).

Notes
215.

1- C'est le titre d'un article de Yves de LA MONNERAYE (1988).