1- Des questions, et quelques réponses, à propos de "l'échec scolaire", aujourd'hui.

L'échec scolaire 231 , dans les termes où il se pose actuellement, a commencé à préoccuper un certain nombre de pays depuis, environ, les années 1960. Une enquête INSERM en 1966 sur la population scolaire du 13 ème arrondissement de Paris faisait ressortir qu'un quart seulement des enfants de six ans était apparemment indemne de tout symptôme. On considère qu'actuellement, 30% seulement des enfants vivent la classe du CP sans problème et y font les acquisitions attendues, et que pour 50 % des enfants, le passage est difficile. "Les problèmes d'apprentissage scolaire constituent, par leur fréquence, un souci important de santé public", déclarait-on au Premier Congrès Européen de Pédiatrie, Bruxelles, en mars 1994.

Un constat s'impose: aujourd'hui, toute profession, aussi manuelle soit-elle, mais aussi toute vie en société, requiert un minimum de bagage intellectuel, de "connaissances de base". On ne peut plus se diriger dans une gare, prendre de l'argent dans un distributeur, s'orienter dans un grand centre commercial, régler ses achats par chèque ou vérifier ses comptes, sans savoir lire, écrire, compter. L'analphabète ou l'illettré est un handicapé social. Et pourtant, aujourd'hui, certains adolescents, qui ont "résisté" aux apprentissages, se retrouvent au collège, en classe de sixième et de cinquième, maîtrisant peu ou mal la lecture. On peut réaliser dans quelles difficultés psychiques et sociales ils se trouvent, quelle violence quotidienne ils subissent. Et pourtant, une enquête récente recense 20% d'analphabètes en France aujourd'hui...On estime que près de 5 % des enfants sont touchés par des difficultés d'apprentissage.

Le Cours Préparatoire est une épreuve décisive dont certains ne se remettent pas. De nombreuses enquêtes ont fait connaître que "tout se joue à 6 ans", qu'un échec au Cours Préparatoire compromet toute la scolarité ultérieure. Toutes les statistiques se rejoignent: 75 % des enfants qui redoublent le CP n'iront pas jusqu'au baccalauréat. De nombreuses enquêtes ont fait connaître à tous que "tout se joue à six ans", et qu'un échec au cours préparatoire, compromet toute la scolarité ultérieure. ‘ "Etre en difficulté dans ses apprentissages à six ans est un symptôme grave. Il ne faut pas le laisser passer, parce que ce symptôme se donne à apparaître dans un moment-clef de franchissement, porteur de tout l'avenir de l'enfant" ’ (THIEFAINE, 1996, p. 21), au moment où l'enfant reçoit les signifiants de son inscription sociale. Le Monde de l'Education de janvier 1991 (p. 57-58), titrait:"L'exclusion dès le primaire" et sous-titrait: "Les 20% d'élèves qui n'auront pas le bac".

Les chiffres concernant la première consultation des parents dans un CMPP, au cours du mois de novembre 1988, annoncent, sur 58 premiers entretiens qui ont donné lieu à ouverture de dossiers (certains enfants conjuguent plusieurs symptômes):

difficultés scolaires 29
langage 22
latéralité 6
comportement 11
problèmes moteurs 3
conseils 6

L'école est elle pourvoyeuse d'élèves en échec scolaire, ou révèle-t-elle les difficultés ou les échecs de l'enfant dans son parcours qui le conduit à être élève? Ce serait nous voiler la face que de vouloir ignorer que le système génère ses propres inadaptations, pour des raisons directement liées à son fonctionnement, par ses propres incohérences, ruptures, dysfonctionnements, par une inadéquation possible entre des méthodes pédagogiques et certains enfants, par un trop grand écart entre le projet proposé par l'école, et celui de certaines familles, par des difficultés relationnelles entre certains enfants et certains maîtres...

Il y aurait "un train à prendre" et malheur à celui qui reste sur le quai. Pourra-t-il prendre le train suivant? Ne sera-t-il pas déjà trop tard? Comment l'école peut-elle "réparer" ce qu'elle a pu produire ou comment peut-elle aider ceux qui ne parviennent pas à s'y intégrer?

Notes
231.

Nous ne distinguerons pas, pour l'instant, "échec" ou "difficulté" scolaires, nous réservant de le faire ensuite.