"Explications" socio-économiques, et législatives...

Les demandes sociales et économiques, croissantes, de formations de plus en plus élaborées, la course aux diplômes jugés indispensables par beaucoup pour la réussite sociale - ou simplement pour pouvoir se faire une place dans la société -, course rendue plus cruciale encore par les difficultés actuelles liées à l'emploi, augmentent la pression sur l'enfant dès son entrée à l'école, pression exercée par les parents et les enseignants, lesquels ne font que répercuter la pression qu'ils subissent eux-mêmes. La prolongation de la scolarité obligatoire, liée à cette nécessité de formation, a augmenté de façon considérable le nombre de jeunes à l'école. Face à cet afflux de nouvelles populations scolarisées, l'école réalise que les mécanismes de sélection qui réglaient non seulement l'entrée dans le cursus scolaire, mais la poursuite de celui-ci pour un grand nombre d'enfants, processus sélectif reposant sur des critères explicites ou le plus souvent implicites, ont eux-mêmes considérablement évolué. La Loi d'orientation sur l'éducation du 31 août 1989 annonçait: 80% de bacheliers en l'an 2000...Des chiffres de l'INSEE du 22-08-95 révèlent qu'en 1995, 50% des jeunes continuent leurs études après le baccalauréat, alors que ce chiffre était de 30% seulement en 1975.

Que l'institution augmente le niveau de ses exigences vis à vis des élèves, le niveau de tolérance des maîtres vis à vis du "déviant" ne s'abaisse-t-il pas parallèlement? Un nouveau système d'exclusion par l'échec s'est-il mis en place?

Dans un système de "Collège unique", selon l'expression utilisée par le texte de la réforme HABY, alors que l'intention déclarée est une poursuite généralisée, pour les élèves, des études au lycée puis dans l'enseignement supérieur, la sélection et l'exclusion d'un grand nombre d'entre eux en cours de route est-elle inévitable? Le collège est en train de vivre une nouvelle réforme dans laquelle les élèves ne sont plus orientés en fin de la classe de cinquième, mais en fin de la classe de troisième.Dans cette école "égalitaire", les procédures d'orientation, ne remplacent-elles pas les filières par une autre forme d'exclusion, celle de l'échec? Il semble qu'aujourd'hui, dans les faits, si l'école primaire puis le collège accueillent tous les élèves qu'un handicap avéré ne dirige pas d'emblée vers un établissement spécialisé, ce soit "l'échec scolaire" qui joue ce rôle de filtre, à tous les niveaux. C'est ce que pensent Philippe MEIRIEU et Michel DEVELAY (1992, p. 87), en affirmant en même temps que ce processus n'est pas inéluctable. ‘ "...l'évolution sociale vers une société duale où l'on traite systématiquement l'échec par l'exclusion ne nous paraît aucunement inéluctable et, quoi qu'il en soit, il nous paraît possible que l'Ecole tente, autant que faire se peut et en collaborant avec tous les partenaires qui partagent la même finalité, de s'opposer à une telle évolution." ’. Que proposent-ils? Il va s'agir ‘ "d'inventer des médiations nouvelles et (de) ne pas se résigner à l'échec," ’ (id. p. 71) de condamner ‘ "toute procédure de sélection qui (peut) être suspectée de cette résignation" ’, de condamner ‘ "les regroupements d'élèves sur des critères scolaires qui ’ ‘ (s'avèrent) ’ ‘ vite être des critères sociaux." ’ (ibid.).

Des facteurs socioculturels aux facteurs économiques, des méthodes pédagogiques aux facteurs institutionnels, la remise en cause de la défaillance des enseignants ou de leur formation, nombreux ont été les facteurs évoqués comme origine de l'échec scolaire de l'enfant. On sait aujourd'hui que tous ces facteurs peuvent influer sur la réussite ou l'échec des élèves, mais que ce ne sont pas les seuls.