Comment peut-on comprendre ce qui constituerait un fonctionnement psychique "normal"?

Qu'entend-on, en premier lieu, par "fonctionnement psychique"? Selon la théorie psychanalytique, le fonctionnement psychique du sujet est le résultat de la coordination entre besoins pulsionnels, défenses du moi et adaptation au milieu extérieur, entre les données internes héréditaires et les caractéristiques acquises au cours de son développement et de son histoire par le sujet, entre les possibilités caractérielles et structurelles et les besoins relationnels. Quel serait, alors, un "fonctionnement normal"? "....la notion de "normalité" est tout aussi liée à la vie que la naissance ou que la mort, utilisant le potentiel de la première en cherchant à retarder les restrictions de la seconde", affirme BERGERET (1985, p. 15).

Si les concepts de normalité et d'adaptation vont jusqu'à se superposer, selon les auteurs, il semblerait que tous s'accordent pour définir la normalité comme un "bon fonctionnement intérieur" , résultat d'un équilibre "suffisamment bon" (pour reprendre l'expression de WINNICOTT à propos de la mère), c'est-à-dire ici jugé acceptable par le sujet lui-même, un fonctionnement qui ne l'empêche pas d'être heureux, de "se sentir bien". Tous s'accordent également à souligner l'importance d'une "adaptation" qui laisse une marge de liberté au sujet, lui permettant d' avoir recours à son imagination , considérée comme la source de sa créativité . Lorsque Jacques LACAN décrit le fonctionnement "normal" du psychisme dans un nouage qui doit rester souple entre les registres du réel, de l'imaginaire et du symbolique, dans une disponibilité nécessaire des trois registres pour le sujet 245 , cette approche apparaît comme en résonance avec celle de Colette CHILAND rapportée ici.

Pour Mélanie KLEIN (1921-1945, ed. 1974, p. 114), santé mentale et capacité de sublimation 246 vont de pair: ‘ "Si nous assimilons la capacité d'utiliser une libido superflue dans l'investissement des tendances du moi à la capacité de sublimer, nous pourrons admettre qu'une personne en bonne santé l'est à cause de sa plus grande capacité de sublimation, dès un stade très ancien du développement de son moi."

Notes
244.

Pour cet auteur, "réél" est ici synonyme de "réalité", et se doit donc d'être différencié du concept de "réél" lacanien, qui évoque, lui, l'indicible, "la limite de notre expérience" (JacquesLACAN1956-1957, ed 1994, p. 31). Cette définition de Colette CHILAND sous-entend que le sujet peut utiliser, quand il le souhaite, son imaginaire, tout en tenant compte des nécessités, des contraintes, des exigences et des limites de la réalité.

245.

Jacques LACAN (1974-1975). L'analyse des "pré-requis" nécessaires à l'enfant pour apprendre, nous conduira à interroger cette articulation entre imaginaire, symbolique et réél.

246.

L'analyse des "préalables" nécessaires à un enfant pour apprendre, nous conduira à interroger ce concept de sublimation.